Retour sur vingt années de sida au cinéma

Depuis vingt ans, l’évocation du virus du sida au cinéma a bien évolué. Petite rétrospective des films les plus marquants sur l’épidémie.

Qui parle encore du sida ? Qui se souvient de ces années noires pour les homosexuels où pas une semaine ne passait sans que l’on apprenne la mort d’un ancien amant, d’un ami, d’une plus ou moins lointaine connaissance fauchée par la maladie ? Ce n’est pourtant pas si loin, le pic de l’épidémie se situant entre 1985 et 1995, avant que l’apparition des trithérapies ne permette aux séropositifs de vivre avec le virus. Au centre de toutes les mobilisations homosexuelles à l’époque, le VIH était aussi au centre de toutes les représentations des gays à l’écran. Durant une décennie, parler des homos à l’écran, c’était parler du sida. Et inversement.

Ce système d’équivalence avait ses limites, elle avait aussi ses avantages : en prônant la compassion et la solidarité pour les malades du sida, on faisait de même envers les gays, comme dans Philadelphia (Jonathan Demme, 1993), première et seule production des grands studios hollywoodiens sur ce sujet avec Les Soldats de l’espérance (Roger Spottiswoode, 1993), qui relate la saga de la découverte du virus. L’essentiel des productions américaines est composé de films indépendants, tels le bouleversant Un compagnon de longue date (Norman René, 1992) ou les comédies dramatiques It’s My Party (Randal Kleiser, 1996), Love ! Valour ! Compassion ! (Joe Mantello, 1995) et Jeffrey (Christopher Ashley, 1995).

Une empathie majoritaire mais parfois ambiguë

En France, la plupart des films adoptent eux aussi cette position d’empathie, parfois ambiguë, vis-à-vis des malades du sida et donc des gays, d’autant que la grande majorité d’entre eux sont réalisés par des cinéastes homos ou bisexuels : que ce soit Paul Vecchiali – dont Encore/Once more est, en 1987, le premier film français à aborder le sujet, sous forme d’une curieuse comédie musicale -, Stéphane Giusti (le téléfilm L’Homme que j’aime, 1997), Olivier Ducastel et Jacques Martineau (Jeanne et le garçon formidable, 1997, Drôle de Félix, 1999), Patrick Mimouni (Le Traité du hasard, 1997), Patrice Chéreau (Ceux qui m’aiment prendront le train, 1997), Jean-Claude Guiguet (Les Passagers, 1998).

On n’oubliera pas Cyril Collard dont Les Nuits fauves deviennent un véritable phénomène de société en 1992, en même temps qu’elles provoquent une retentissante polémique liée au fait que son héros séropo ne se protège pas dans ses rapports, prenant le risque de contaminer sa petite amie.

Ces films reflètent en tout cas l’évolution des attitudes sociales envers la maladie. Les premiers figuraient la peur panique et le déni des débuts de l’épidémie ainsi que la colère militante si présente chez Giusti ou dans Jeanne et le garçon formidable. Quant aux films les plus récents, on y aborde la question des traitements, heureusement de plus en plus efficaces, ou encore celle du travail de deuil intime et de mémoire collective à raviver sans cesse dont portent la trace Les Témoins d’André Téchiné (2007) ou Nés en 68.

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