Complices : escort de composition

complicesTourné à Lyon au mois de septembre, le film de Frédéric Mermoud, Complices, met en scène une histoire d’escort-boy qui finit mal.

 

Cyril Descours sort de la villa. Dans le film il s’appelle Vincent, c’est un escort : «Dis à l’ophtalmo que c’est d’accord». On n’en saura pas plus, il raccroche son téléphone. «Coupez !». La scène se passe à Caluire. Entre Villeurbanne et Lyon, quatre semaines de tournage dans l’agglomération pour cette histoire étrange. Le corps d’un jeune homme est retrouvé dans le Rhône et sérieusement amoché. Que s’est-il passé ? L’enquête commence. Les inspecteurs Cagan (Gilbert Melki) et Mangin (Emmanuelle Devos) décortiquent l’affaire. Ce n’est pas seulement l’intrigue policière qui intéresse Frédéric Mermoud, réalisateur de Complices, c’est la dérive de ces deux personnages, Vincent et Rebecca, cette passion tragique de deux ados, précoces sur le plan sexuel, mais restés trop fragiles pour le monde terrible dans lequel ils plongent. Nina Meurisse joue Rebecca avec l’énergie du désespoir, comme si l’amour pouvait finir par gagner, comme si ces deux êtres allaient réussir à se sauver l’un par l’autre. Cyril Descours est troublant, il se laisse porter par le personnage, à vivre sa dérive au jour le jour, le plus naturellement du monde, même les scènes de prostitution, comme s’il ne voyait rien arriver. Chemin des Vacieux, à Caluire, on est en train d’arroser la rue d’une pluie de cinéma. 19 heures, tout le monde est parti se restaurer à la «cantine». Dans une heure on reprend le tournage. Quelques minutes pour une interview.

 

Cyril Descours : « Vincent vit sa sexualité commerciale sans tabous »

Quand vous vous êtes présenté au casting, vous connaissiez le scénario?
Non, pas encore. Mais les scènes d’essai étaient déjà assez explicites. Je savais que j’allais devoir faire un rôle de composition. On n’a pas tous les jours à jouer un personnage de prostitué aussi complexe et profond que celui-là.

Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce personnage?
La fracture qu’il a en de lui. Pourquoi il s’est réfugié dans la prostitution. Comment on en arrive à faire ce métier-là. J’ai rencontré plusieurs personnes qui faisaient ça, qui le vivaient plutôt mal. Ils le cachaient à leur entourage, ou alors ils avaient des problèmes dans leur vie privée. Le personnage de Vincent, lui, l’assume totalement, il vit sa sexualité commerciale sans aucun tabou.

Ses clients sont des hommes mais il vit une histoire d’amour avec une fille, il est bi?
Pour moi c’est un hétérosexuel qui a une sexualité libre, il vend son corps à des hommes jusqu’à ce qu’il rencontre Rebecca et qu’il tombe amoureux fou. Au point de faire un enfant tout de suite.

C’est un personnage qui fait peur, pour un acteur?
Il y a des scènes qui ne sont pas forcément faciles, avec les clients, des scènes de prostitution. Mais grâce à la direction de Fredéric Mermoud et à ma partenaire, ça s’est bien passé. Le plus important pour moi, c’est de rendre cette spontanéité du personnage qui vit les situations au jour le jour sans se poser de questions. Rien n’est prémédité.

Est-ce que le tournage a modifié votre regard sur les escorts ?
Ce qui l’a modifié, c’est d’en avoir rencontrés. J’espère ne pas les trahir. J’ai vu des gens comme vous et moi mais avec en eux cette fracture, ce secret. J’essaie de ne pas en faire trop. Dans le scénario, les choses arrivent comme ça, le personnage les prend comme elles viennent jusqu’à la catastrophe finale. Tout est dans l’instant.

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