Tabloïd, le Lyonnais qui bouscula Paris

L’interview de Christine Boutin «J’aime le sexe», c’est lui. La révélation de Bruno Gollnisch «oui j’ai eu des attirances pour des garçons», c’est encore lui. En un an d’existence, Tabloïd s’est amusé à renverser le jeu de quilles plus d’une fois. Repris par la presse nationale, cité régulièrement dans des émissions de télévision, comme chez Ardisson, il a rapidement fait sa place. Ce qui n’était pas gagné pour un mensuel gay et provincial. Tabloïd est né à Lyon, d’un croisement de neurones entre Jean-Olivier Arfeuillère, alors patron de Lyon Capitale, et Guillaume Tanhia, futur rédacteur en chef. En 1996, la presse gay n’est pas florissante. D’un côte, Têtu, très parisien, très magazine. De l’autre, pas grand chose : de vagues journaux attrape-pubs sans vrai contenu rédactionnel. Or, on est en pleine bataille du Pacs. Tabloïd sera gratuit, diffusé à 50 000 exemplaires sur toute la région Grand Sud-Est, jusqu’à Marseille et Montpellier. Maquette soignée, format tabloïd bien sûr, photos couleurs. On y trouve de l’actualité, des dossiers, des interviews. «Nous avons été bien accueillis. Mis à part William Sheller, je ne crois pas que quiconque nous ait refusé une demande d’interview», se souvient Guillaume Tanhia. Le contenu est sérieux mais le ton est drôle, décalé. Il y a du récréatif, des rubriques légères comme les fameux conseils de Tata Jacqueline. Et des petites annonces. «La clé du succès ? C’est surtout un attachement très fort des lecteurs» insiste Guilaume Tanhia. «Ils nous adressaient leurs annonces avec des petits mots, ils nous racontaient des choses sur eux, nous encourageaient». Le journal se porte bien. Grâce aux revenus de la publicité, il gagne même de l’argent. Mais les forces s’usent vite. L’équipe permanente est constituée de deux rédacteurs seulement, assistés de quelques pigistes. Toute la région sud-est à couvrir, ça finit par faire lourd. Et puis, «Manger pédé, sortir pédé, travailler pédé, on frise la ghettoïsation. Au bout d’un moment j’avais besoin d’aller voir ailleurs». Guillaume arrête, passe à autre chose. Le journal ne redémarrera pas. Depuis le Pacs est voté, les mentalités changent, la visibilité des gays progresse partout. C’est une autre presse gay qui voit le jour. Même Têtu est devenu moins parisien.

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