RDV avec… Colin

101226_12RDVavec...1imAprès une prépa à Paris, l’École Normale Supérieure de Lyon et des études en sociologie, Colin a obtenu une bourse pour une thèse qui a pour sujet la “gaytrification“, autrement dit le rôle des gays dans l’embourgeoisement des quartiers populaires.

Pour mener à bien ses études de terrain, Colin quitte Lyon pour étudier Paris et son Marais mais aussi Montréal et son Village. «Je me suis donc lancé sur le Marais, mais je n’avais pas de réseau au départ. Ce n’était pas évident de rencontrer des gens pour des études de terrain. Mais ensuite, le réseau se développe. Par exemple, la section PS du 3e arrondissement est une très bonne entrée pour trouver des homos ! C’était Gayland !». Colin est ensuite parti deux mois à Montréal, car il souhaitait trouver pour sa thèse un vrai contrepoids nord-américain. Là-bas, l’étude de terrain a été plus facile à mener. «Le Village est vraiment communautaire, tout est visible et institutionnalisé. Ça se voit, il y a de vraies frontières explicites et dans le quartier tout est gay, les banques, les Starbucks, le toilettage canin, tout estrainbow. Cette notion de communauté est très acceptée parce que le Canada est un État fédéral. La communauté à Montréal, c’est une solidarité». Colin note deux catégories de population vivant dans le Village : des familles populaires et hétérosexuelles et une population plus riche majoritairement composée de gays. Il porte aussi un regard critique sur le pouvoir “émancipateur“ de ces quartiers, loué par beaucoup de géographes. Loin d’être de vrais espaces de liberté, où le poids des normes serait suspendu pour un temps, Colin note que comme dans tout espace urbain, il y a là-bas aussi des inégalités socio-économiques. «La question du fric, des conventions et des normes existe dans ces quartiers et peut-être même plus fortement qu’ailleurs. C’est aussi des lieux de solitude et de souffrance. Dans ces quartiers, il y a tout un travail d’incorporation des normes. On apprend à devenir gay. On n’aime pas forcément Madonna au départ ! C’est un vrai travail de socialisation». Sa soutenance a eu lieu il y a tout juste deux mois et s’est très bien passée. «Je n’ai eu aucun problème d’un point de vue universitaire avec ce sujet-là, j’ai seulement eu une question lors de ma soutenance qui planait depuis cinq ans mais que j’avais préparée puisque je savais qu’elle allait être posée tôt ou tard : «comment gérez-vous le statut d’insider dans cette recherche ?». La question venait de la jurée canadienne, les autres profs étaient scandalisés. Pour elle, c’était une vraie question, ça ne la gênait pas du tout. C’est le Canadian style!».

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