Don du sang : «les gens sont au minimum surpris, souvent choqués»

Le 18 janvier 2012, l’Établissement Français du Sang (EFS) a organisé une campagne de don du sang place de la République, dans le deuxième arrondissement de Lyon. Rencontre avec les militants de l’association Pourquoi Sang Priver qui étaient sur place pour protester contre la fermeture du don du sang aux homosexuels masculins.

don du sang Le fond de l’air est glacial ce mercredi de janvier. À l’extrémité nord de la place de la République, deux camions estampillés Établissement Français du Sang (EFS) avalent et recrachent les passants à rythme régulier. Juste devant, un petit groupe de personnes interpelle les badauds, distribuant des tracts et répondant aux questions. Mines souriantes, t-shirts blancs et logos rouges, difficile de ne pas les prendre pour des bénévoles du don du sang. C’est d’ailleurs le but : comme ils sont les seuls à camper devant les camions, les passants viennent les voir en premier.

«Les gens sont au minimum surpris, souvent choqués quand on leur parle de cette discrimination, presque personne n’est au courant» explique Cyril Chevreau, président de l’association Pourquoi Sans Priver. C’est en essuyant un refus lors d’une tentative de don que cet homme d’une trentaine d’années a eu l’idée de créer cette association. Depuis, il installe régulièrement ses bannières près des événements organisés par l’EFS pour sensibiliser les donneurs potentiels. Une cohabitation parfois compliquée : «il y a quelques années, on s’est présenté devant un stand avec une affiche détournée. Quelques minutes plus tard, le service de sécurité nous demandait d’aller ailleurs». Toujours très provocateur, il a profité à plusieurs reprises des déplacements officiels de Xavier Bertrand, ministre de la Santé, pour l’interpeller sur la question du don du sang. Cyril Chevreau ne cache d’ailleurs pas son amertume à l’évocation du nom du ministre, qui se déclare favorable à l’ouverture du don du sang pour les homosexuels depuis 2006 sans pourtant rien faire dans cette direction. Le tract que distribuent les militants pointe ce paradoxe avec ironie : «cette fois, monsieur le ministre, arrêtez les discours et la langue de bois, agissez, vous êtes là pour ça !».

don-du-sang-gay-homosexuel-sos-homophobie-etablissement-francais-du-sangDerrière son bureau, un médecin en blouse blanche tamponne frénétiquement des formulaires sans jeter un œil aux arrivants. Comme les banquettes ne sont pas assez grandes pour que tous les donneurs puissent patienter dans de bonnes conditions, certains doivent attendre à l’extérieur du camion qu’un peu de place se libère.

Deux étudiantes, Chloé et Sandra, viennent pour la première fois. «On est passé devant par hasard et on s’est dit qu’on pourrait faire une bonne action». Dans leurs mains, un tract distribué par les militants de Pourquoi Sang Priver, qui continuent leur campagne de sensibilisation un peu plus loin. «J’ai cru que c’était une blague, raconte Sandra. Ça semble tellement hallucinant, j’en parlerai autour de moi». Interrogés sur la question, les médecin se renvoient la balle avant de couper court par un «on n’a pas le temps», tout en montrant de la main les nombreux donneurs qui patientent. S’il y a effectivement la queue, les médecins n’ont pas l’air débordés pour autant : l’attente est surtout imputable au peu de matériel médical disponible dans le camion. Entre délivrer le point du vue du gouvernement et donner leur propre position, les médecins ont fait le choix de ne rien communiquer. La question dérange, donc, et ce ne sont pas les propos tenus le 23 janvier par le docteur Jean-Pierre Calot, chef de service à l’Établissement français du sang de la région Midi-Pyrénées (qui a été suspendu de ses fonctions trois jours plus tard), qui apaiseront les esprits.

Écoutez les propos du docteur Calot, à partir de 1’35 :

Pourquoi Sans Priver

 

Poster un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.