La révolte gronde encore

Depuis qu’il dirige l’Opéra de Lyon, chaque saison, Serge Dorny souhaite que le public se retrouve en immersion totale dans un festival. Celui de cette année s’articulera autour du double thème Justice/Injustice et ce nouveau cru ne ressemble à aucun autre, parce qu’il propose une concentration de talents exceptionnels au service d’un thème à la fois contemporain et de tous les temps.

RevolteGronde

Bien sûr, Fidelio de Beethoven est programmé dans une version peu banale, mise en forme et en espace par le touche-à-tout Gary Hill. Bien sûr encore, il y a les représentations du Prisonnier de Dallapiccola et d’Erwartung de Schoenberg, mis en scène par Àlex Ollé, chef de fil visionnaire de la compagnie catalane La Fura dels Baus. Mais surtout, attendu comme le Messie, il y a Claude, mis en scène par un Olivier Py plus visionnaire que jamais, sur un livret de Robert Badinter, d’après Victor Hugo Robert Badinter, celui-là même, ministre de la Justice en 1981, qui défendit devant le Parlement l’abolition de la peine de mort.

«En relisant Claude Gueux, bref roman de Victor Hugo – que j’ai toujours considéré être une œuvre supérieure au Dernier jour d’un condamné – je me suis dit qu’il y avait là matière à opéra. Claude Gueux est le représentant de tous ces révoltés du XIXe siècle, tous ces hommes qui n’acceptent pas l’injustice sociale, leur condition prolétaire».

Thierry Escaich (dont l’œuvre, puissamment spirituelle, est l’une des plus fascinantes de notre époque) écrit là son premier opéra. Son univers musical, ni intellectuel, ni cérébral, ni facile, reste singulier et pétri d’humanité. Olivier Py a imaginé pour l’occasion une prison éternelle, rappelant tantôt celle de Clairvaux à l’époque de Claude Gueux, tantôt celles des années 1960, avant l’abolition de la peine de mort. Les personnages sont enfermés derrière une grille de lumière qui apparaît ou disparaît au fil de l’œuvre, pour qu’on puisse voir par moments, comme le souhaite Olivier Py, «la liberté intérieure de ces hommes». Au XXIe siècle, il est bon qu’un opéra mette le doigt sur la pérennité de l’injustice sociale.

Festival Justice/Injustice, du 27 mars au 15 avril à l’Opéra de Lyon, place de la Comédie-Lyon 1/ 0826.305.325 / www.opera-lyon.com

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