amour droite la manif pour tous 2 fevrier 2013 strasbourg credit Claude Truong Ngoc - Wikimedia Commons

Chers homophobes, nous ne voulons pas de votre “amour” condescendant

«On vous aime !»

(Déclaration d’amour de participants à la «Manif pour tous» à des gays qui les invectivaient)

Et bien nous, chers manifestants «pas homophobes, mais…», on ne vous aime pas. C’est dit. Et n’allez pas nous accuser d’intolérance ou de sectarisme : l’amour, comme le respect, cela se mérite. Parlons-en, tiens, de votre amour, vous qui défilez contre nos droits mais vous enorgueillissez d’avoir des amis homos et qui vous êtes choisis pour leader une «fille à pédés» autoproclamée. Vous nous aimez comme Scarlett O’Hara aime Prissy, son habilleuse noire dans Autant en emporte le vent. Ou comme Louis XVI «aimait son peuple» (c’est une autre de vos égéries, Christine Boutin, qui l’a dit récemment à l’occasion du 220e anniversaire de la mort du monarque guillotiné) : avec toute la condescendance que vous autorise votre position sociale supérieure dans un monde hétéronormé.

La domination est toujours invisible aux yeux du dominant

En réclamant les mêmes droits que vous, en quittant même provisoirement la réserve folklorique où vous voudriez nous voir assignés (celle des backrooms et des boîtes de nuit), on le sent bien, on vous déçoit. Vous le vivez comme une trahison et c’est bien pour cela que votre réaction est si violente. Vous vous indignez que l’on puisse vous taxer d’homophobie et vos dénégations, à défaut d’être convaincantes, sont sans doute sincères, car la domination est toujours invisible aux yeux du dominant. Notre demande légitime d’égalité, vous la qualifiez d’égalitarisme pour mieux la discréditer, parce que, pensant savoir mieux que nous ce qui est bon pour nous, vous ne la concevez tout simplement pas.

Chacun à sa place et les vaches seront bien gardées, pensiez-vous : aux hétéros le confort et la sécurité du mariage, aux homos le frisson délicieux des amours clandestines. Votre différentialisme vous rassurait, notre universalisme vous ébranle. Vous nous tolériez tant que nous restions des créatures exotiques, à la fois intrigantes et amusantes ; mais que l’on puisse, même par esprit de contradiction, chercher à vous ressembler et voilà que votre curiosité complaisante d’autrefois se transforme en répulsion.

Que ceux qui craignaient de voir les gouines et les pédés rentrer dans le rang à cause du mariage homo se rassurent : la panique dans vos yeux et la haine mal dissimulée de vos propos nous prouvent que sortir du rôle auquel la société nous assigne, fut-il «décadent» et subversif, est toujours un attentat contre l’ordre établi. Vous avez peut-être des amis homos ; mais nous, nous n’avions personne, dans les cortèges du 24 mars dernier, qui puisse sans forfanterie se prévaloir de l’honneur de se dire «notre ami».

 

Photo © Claude Truong-Ngoc

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