Prior’s Band-t-il ?

Il y a deux ans, la compagnie Le Souffleur de Verre se produisait dans le cadre du festival Face à Face de Saint-Étienne avec Angels in America Quatuor, une adaptation de la pièce à succès de l’Américain Tony Kushner, recentré autour des deux couples de protagonistes : Louis et Prior d’une part, Joe et Harper de l’autre.

À l’époque, la jeune troupe implantée à Clermont-Ferrand avait laissée entendre que ce premier travail autour d’Angels in America, pièce monumentale de huit heures retraçant les aventures d’une poignée de New-Yorkais confrontés à l’émergence du sida au milieu des années 1980, était le prélude à une exploration en profondeur de l’œuvre de Kushner. Deux ans après, ils reviennent donc à Saint-Étienne (toujours dans le cadre de Face à Face) avec un nouveau projet, Prior’s Band, centré autour d’un seul des personnages de la pièce, Prior. Ce dernier, ancien drag-queen à l’humour camp prononcé, doit faire face, au moment de l’annonce de sa séropositivité, à l’abandon de son compagnon Louis, terrifié par la maladie, ainsi qu’à l’apparition d’un ange l’accablant d’une mission de prophète. À travers les rêveries et les hallucinations de ce personnage, Kushner multiplie les clins d’œil à la communauté gay, convoquant des références culturelles et artistiques allant de Judy Garland à Spielberg, immédiatement saisissables par le public des années 1990. Or, c’est cette connexion avec le public que Le Souffleur de Verre tente de rétablir avec Prior’s Band. S’appuyant sur le passé de showman du personnage, la compagnie transfère l’action dans un cabaret où se produit Prior, entouré de deux musiciens multi-instrumentistes. Les allusions musicales et cinématographiques de Kushner sont alors utilisées afin de créer la trame d’un spectacle que Le Souffleur de Verre enrichit de nouvelles références, plus parlantes pour le public français de 2013. Ce faisant, la troupe clermontoise réactive les mécanismes de résurgence et de convergence des arts à l’œuvre dans Angels in America, mettant en exergue la charge humoristique d’une pièce qui aborde néanmoins de front un sujet difficile. À l’heure où la prévention du sida est quasi-inexistante et où les luttes homosexuelles semblent avoir abandonné toute ambition politique, ce coup de projecteur sur notre histoire collective pourrait bien s’avérer salutaire.

Prior’s Band, samedi 30 novembre à la Comédie de Saint-Étienne, 7 avenue du président Émile Loubet-Saint-Étienne / 04.77.25.14.14

Photo : Prior’s band par la compagnie Le Souffleur de Verre – © Marielle Pommier

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