«La Passion», de Jeanette Winterson (éditions de l’Olivier)

La-Passion-editions-Olivier-HeterocliteJeanette Winterson a eu l’excellente idée d’écrire La Passion à la première personne. Elle est ainsi tour à tour Henri (jeune soldat dévoué à Napoléon Ier) et Villanelle, vénitienne travestie en homme travaillant dans un casino. Ces deux personnages ne viennent pas du même pays ni du même milieu social, mais ils ont un point commun : la passion, une notion philosophique et religieuse qui, comme l’indique le titre, est au cœur de l’œuvre. Elle est inévitable, provoquée, provocante, omniprésente et se joue aux cartes. Quand une Dame de pique vole le cœur de Villanelle, on entre avec elle dans un conte et on se laisse porter par l’intrigue comme elle flotte sur les lagunes vénitiennes. Tout est double ou triple dans le texte de Winterson, de son “je“ aux multiples facettes de Villanelle (à la fois fille, garçon, bisexuelle et amante passionnée) en passant par les sacrifices d’Henri (dévot à Dieu comme à son Empereur, mais aussi preux chevalier sceptique et déçu). Les mots de Winterson nous submergent et nous subissons de plein fouet la violence des campagnes de guerre de Napoléon comme la misère crasse des quartiers populaires de Venise. L’utilisation d’un langage familier de l’époque (le début du XIXe siècle) rend l’immersion plus facile encore. Le lecteur n’est plus simple spectateur des scènes qui se dessinent dans son esprit mais bel et bien acteur. Lui aussi veut retrouver le cœur de Villanelle en tentant le tout pour le tout. Jeanette Winterson nous plonge alors dans une vraie littérature, celles des beaux mots, choisis avec soin, quand la prose devient poésie.

La Passion de Jeanette Winterson (éditions de l’Olivier)

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