L’ILGA-Europe, un lobby pro-LGBT au cœur de l’UE

Entretien avec Juris Lavrikovs, porte-parole de l’ILGA-Europe, à propos du rôle de son organisation et de l’Union européenne dans la défense des droits LGBT.

Comment fonctionne votre organisation et quels sont ses objectifs ?

L’ILGA-Europe a été fondée par des associations de toute l’Europe qui estimaient qu’il pouvait être bénéfique pour elles de s’unir pour défendre les droits LGBT à l’échelon supranational. Nous travaillons avec toutes les grandes institutions européennes : le Parlement, la Commission, le Conseil européen, le Conseil de l’Union européenne, le Conseil de l’Europe et même dans une certaine mesure l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

Notre première tâche consiste à nous assurer que les membres de ces différentes institutions sont conscients de la situation des droits LGBT pays par pays et de nos revendications. Nous développons également un plaidoyer pour les convaincre de mettre en œuvre des politiques favorables à l’égalité des droits. Enfin, une part importante de l’activité de l’ILGA-Europe consiste à venir en aide aux associations qui défendent les droits LGBT à l’échelon national dans chacun des États-membres.

Leurs situations sont en effet très diverses : on trouve à la fois des organisations très bien établies en Europe occidentale et d’autres plus nouvelles, notamment dans les pays qui n’ont retrouvé leur pleine indépendance et la démocratie que très récemment. Nous leur proposons ainsi des stages et des formations sur la meilleure façon de défendre les droits des personnes LGBT, de faire connaître leurs revendications, etc.

Quel rôle jouent les institutions européennes dans la défense des personnes LGBT ?

Le Conseil de l’Europe (qui rassemble 47 États et dont l’action principale est précisément la défense des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit) a été la principale force motrice qui a poussé à l’abandon des lois pénalisant les activités sexuelles entre personnes du même sexe, notamment dans les pays de l’ancien bloc soviétique. L’Union européenne (UE) a également été la première institution internationale à introduire le concept d’orientation sexuelle dans son droit et ses traités (comme dans l’article 2 du traité d’Amsterdam en 1997). C’est ainsi grâce à l’UE s’il y a aujourd’hui des lois contre les discriminations à l’emploi fondées sur l’orientation sexuelle dans chacun des vingt-huit pays membres, ainsi que dans certains pays candidats à l’adhésion.

Quelles sont vos relations avec les sept groupes politiques représentés au Parlement européen ?

ILGA-Europe est une organisation non-partisane qui n’est affiliée à aucun mouvement politique. Nous sommes donc ouverts au travail et à la discussion avec tous les groupes, à l’exception peut-être de ceux qui sont idéologiquement opposés à l’avancée des droits LGBT. Nous collaborons ainsi avec l’intergroupe pour les droits LGBT pour surveiller la Commission européenne et nous assurer que ces questions ne soient pas ignorées.

Historiquement, ce n’est un secret pour personne que les partis de gauche, les libéraux et les écologistes ont été les plus engagés en faveur de ces droits. Mais cette question tend à devenir transpartisane et mobilise de plus en plus les eurodéputés du Parti populaire européen (droite, NdlR) et conservateurs. Et c’est une très bonne chose, car les partis de droite et de centre-droit constituent aujourd’hui la force politique dominante en Europe, tant au Parlement qu’au niveau national. Il faut donc prendre acte de cette réalité, travailler avec eux, les sensibiliser aux thématiques LGBT, faire de la pédagogie et trouver des points d’accord.

Certains estiment que les Parlements nationaux ont davantage de légitimité que le Parlement européen pour traiter de ces questions qui suscitent de vifs débats…

La répartition des compétences entre Parlements nationaux et Parlement européen est très clairement définie : ce dernier ne légifère donc que dans les domaines qui lui ont été attribués !

 

 

Financements et activités

Créée en 1996, l’ILGA-Europe est la branche européenne de l’International Lesbian and Gay Association (ILGA). Elle est basée à Bruxelles et reçoit depuis 2000 des financements de la Commission européenne (1,4 million d’euros en 2012), qui s’ajoutent à ceux du gouvernement néerlandais, du département d’État américain ou d’ONG comme Freedom House ou l’Open Society Foundations du milliardaire américain George Soros. En mai, à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre l’homophobie, elle dévoilera comme chaque année son rapport intitulé Rainbow Europe, qui mesure la qualité de vie des personnes LGBT dans près d’une cinquantaine de pays selon plusieurs critères : reconnaissance des familles homoparentales, possibilité de changer d’état civil, liberté d’expression, de rassemblement et d’association, droit d’asile, lois contre les discriminations, protections contre les actes et les discours homophobes et transphobes, etc.

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