“Reflets dans un œil d’or” réédité en version dorée

Reflets dans un œil d’or, chef-d’œuvre méconnu de John Huston, est réédité dans la version “dorée” originellement souhaitée par son réalisateur.

 

marlon brando Reflets dans un œil d’or de John Huston heteroclite
Un jeune homme, un jeune soldat à la grâce sculpturale, un jeune soldat nu sur un cheval qui traverse la nuit, indifférent à tout. Et un homme caché qui le regarde, fasciné, un militaire aussi, un officier dont la beauté fatiguée trahit le temps, l’alcool, les illusions perdues et surtout les désirs secrets, innommables, refoulés. Dans le camp militaire de Géorgie où se déroule cette histoire, le colonel Penderton n’est pas le seul, loin s’en faut, à lutter contre sa frustration. Tous les personnages en sont saisis et en perdent la raison : sa trop belle épouse qui le méprise et le trompe avec son meilleur ami, la femme de ce dernier qui a perdu la raison et s’est auto-mutilée, le soldat aussi… C’est un grand creuset de tous les refoulements que filme John Huston en 1967, dans ce chef-d’œuvre méconnu qu’est Reflets dans un œil d’or. Servi par un casting de rêve (Elizabeth Taylor, Marlon Brando, Julie Harris…), il met en fusion toutes les pulsions sexuelles et toute la violence que génère leur auto-répression. Il met surtout l’accent sur les sentiments impossibles de Penderton, sur cette incapacité même qui est la sienne à nommer ce qu’il ressent pour le soldat Williams, tant il ne sait rien d’une homosexualité qui le dégoûte, la seule image qu’il en a étant la répugnante caricature incarnée par le serviteur philippin précieux et couard de ses voisins. Tout cela le ronge, le détruit, le conduira au pire. Réalisé alors qu’Hollywood commence à peine à se défaire de la censure, dans un moment où la libération sexuelle est en marche, Reflets dans un œil d’or est l’adaptation d’un roman de Carson McCullers datant de 1941. Passionné d’expériences esthétiques autant que de jeux avec la morale, Huston avait choisi de tourner en donnant un effet doré assez inouï à ses images. Au bout de quinze jours, sous pression de son distributeur, il fut obligé de revenir à une version traditionnelle. La version dorée était quasi-invisible. Elle fait partie d’un coffret édité par Warner Home Video et ça fait un sacré bonus. «Il y a un fort dans le Sud, où il y a quelques années, un meurtre fut commis. Les acteurs de ce drame étaient deux officiers, un soldat, deux femmes, un Philippin et un cheval». Ainsi commence le roman, ainsi commence le film. C’est terriblement somptueux.

Reflets dans un œil d’or de John Huston (Warner Home Video). Voir un extrait ici.

Photos : Elizabeth Taylor (photo 1) et Marlon Brando (photo 2) dans Reflets dans un œil d’or de John Huston

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