“Le Chanteur” de Rémi Lange, comédie musicale fauchée mais bouleversante

Thomas Polly présentera le dernier film de Rémi Lange, Le Chanteur, dont il tient le rôle principal, lors d’une séance spéciale organisée par le festival Vues d’en face.

le chanteur remi lange thomas polly festival ecrans mixtes«Je ne saurais pas quoi faire d’autre que des films». Il y a longtemps, Rémi Lange m’a dit ça lors d’une interview. Les années ont passé. Lassé des embûches et du manque de moyens, fatigué de rester à la marge de la marge du système et de n’être pas reconnu à sa juste valeur, Rémi Lange a pris du champ. Et puis, le cinéma l’a rattrapé. Lui qui a si formidablement usé de sa propre vie comme matériau de son œuvre (Omelette, il y a vingt ans !), il n’a pas résisté dans Le Chanteur au désir de saisir la vie d’un autre (Thomas Polly, interprète et inspiration de cette histoire) pour la recomposer à sa manière – c’est-à-dire cruellement intime, fastueusement impudique, terriblement et implacablement ancrée dans un réel gorgé de trognes, de sordide et de merveilleux.

À la fois bouleversant et exaspérant

Alors, dix ans après avoir posé sa caméra, Rémi Lange est reparti au combat, courageusement (voilà bien un mot qui s’applique à son travail, à sa détermination sans faille). Courageusement, parce que rien ne s’est arrangé de ce qui l’avait fait céder : les sous manquent toujours, les accompagnements professionnels aussi (où sont les producteurs ? les exploitants ? tous ceux qui aident les films à exister ?)… Il ne reste que lui, que sa petite bande, que son énergie pour faire vivre ce nouveau film, Le Chanteur, bouleversant et exaspérant, impossible et miraculeux, cette version fauchée et travestie d’Une étoile est née, avec un jeune homme qui, au lendemain de la mort de sa mère, enfile sa perruque, quitte sa famille et va tenter sa (mal)chance de chanteur à Paris…

Sur cette base, Rémi Lange déploie ce que son cinéma a, depuis l’origine, de meilleur : cette façon bien à lui de fouiller les corps, de fouailler les âmes, de dévoiler les visages, de magnifier les destins, même les plus improbables – surtout les plus improbables ! – au plus près, toujours au plus près. Cela dérange parfois. Souvent. Car il montre ce que nul autre ne montre, car il filme ceux que nul autre ne filme. C’est beau et c’est laid. C’est tragique et c’est comique (ah, cette scène inoubliable de baise en djellaba…). C’est bancal et c’est juste. C’est du cinéma. Pur. Plein d’impuretés. Du vrai cinéma. Rémi Lange ne sait pas quoi faire d’autre que des films ? Tant mieux. Qu’il continue !

 

Le Chanteur de Rémi Lange
Jeudi 30 mars 2017 à 18h30 à la Bibliothèque Kateb Yacine, 202 Grand’Place-Grenoble / 04.38.12.46.20 / www.vuesdenface.com

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