Hillary Clinton, une amie qui nous veut du bien ?

Si elle est élue présidente des États-Unis, Hillary Clinton sera-t-elle une bonne alliée des luttes féministes et LGBT ?

Rien n’est encore joué, mais il semblerait qu’Hillary Clinton ait désormais de sérieuses chances de devenir, le 8 novembre, la première femme élue à la présidence des États-Unis. Une femme à la tête de la première puissance mondiale, dans les faits, ça change quoi ? En tant que role model, une femme présidente participerait à l’évolution des mentalités : par un processus d’identification, elle contribuerait à changer de façon positive les représentations que les femmes ont d’elles-mêmes et que les hommes ont d’elles. S’il a évidemment ses limites, l’effet du role model, souvent méconnu en France, n’est ainsi pas uniquement symbolique mais peut aussi avoir des répercussions très concrètes.

Mais être une femme suffit-il à faire d’Hillary Clinton une féministe ? La candidate démocrate revendique en tout cas le terme. Féministe, elle l’est assurément davantage que son rival républicain – il faut dire que l’être moins paraît difficile… Clinton est en tout cas une fervente pro-choice (une partisane du droit à l’avortement). Mais son colistier, le sénateur de Virginie Tim Kaine (qui deviendra son vice-président si Clinton est élue et président si elle décède au cours de son mandat), défend à ce sujet des positions plus ambigües : s’il y est personnellement opposé, il ne demande pas son interdiction mais a soutenu plusieurs mesures visant à limiter les possibilités pour une femme enceinte d’avorter.

Plusieurs de ses opposant-e-s (comme la féministe Nancy Fraser) ont néanmoins accusé Hillary Clinton de défendre un féminisme de classe, blanc et bourgeois, davantage axé sur la réussite individuelle des femmes issues des milieux aisés que sur l’émancipation de toutes et la prise en compte des différentes oppressions (sexistes, racistes, classistes…) que vivent les femmes.

Du refus au soutien du mariage pour tous

Hillary Clinton soutient depuis longtemps (au moins depuis ses années de Première Dame) la lutte contre les discriminations LGBTphobes. Il en est une, pourtant, et de taille, qu’elle a autrefois encouragée : c’est celle qui concerne le droit au mariage. Sous la présidence de son mari, elle a ainsi défendu le Defense of Mariage Act, une loi (invalidée pour inconstitutionnalité par la Cour Suprême en 2013) qui définissait le mariage comme l’union d’un homme et d’une femme. En 2000, elle se déclarait ainsi opposée à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, tout en soutenant la reconnaissance d’unions civiles pour les personnes homosexuelles ouvrant les mêmes droits que le mariage. Sa position sur le sujet évolue au cours des années 2000 et elle s’est félicitée l’an dernier de la décision de la Cour Suprême légalisant le mariage pour tous sur tout le territoire américain.

Sur cette question comme sur d’autres, Clinton apparaît davantage comme une suiveuse que comme une avant-gardiste, et elle s’est montrée soucieuse de coller au plus près aux évolutions de l’opinion publique et de la coalition électorale démocrate. Elle bénéficie néanmoins du soutien indéfectible de la Human Rights Campaign, la principale organisation de lobbying pour les droits LGBT aux États-Unis, et aussi d’une large part de cet électorat : selon un sondage réalisé en septembre, 72% des personnes LBGT soutenaient Clinton, contre seulement 20% pour Trump.

L’impact des politiques économiques et sociales

Il faut cependant garder à l’esprit que l’impact sur les femmes et sur les personnes LGBT (notamment les plus précaires) des politiques économiques et sociales défendues par Hillary Clinton pourrait être tout aussi, sinon plus, déterminant pour évaluer son action que son soutien à l’égalité juridique entre homos, bi et hétéros ou entre personnes cis- et transgenres.

Il est à craindre que, dans ce domaine, Hillary Clinton répète les mêmes erreurs que son mari. Celui-ci, salué par l’écrivaine Toni Morrison comme «le premier président noir des États-Unis», a pourtant mené des politiques publiques (notamment la réforme de l’aide sociale et la lutte contre la criminalité) qui ont conduit à un appauvrissement et à une incarcération disproportionnée des Africains-Américains… De la même manière, la proximité de Clinton avec Wall Street et son soutien aux politiques de dérèglementation tarifaires, économiques et financières auront aussi des conséquences – désastreuses – sur une grande partie des personnes LGBT.

 

Photo © Gage Skidmore

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