exposition universelle rachid ouramdane credit patrick imbert

Avec “Exposition universelle”, Rachid Ouramdane dépeint ce que le pouvoir fait aux corps

Comment le pouvoir politique affecte-t-il les corps des individus ? C’est à cette question que tente de répondre le spectacle Exposition universelle du chorégraphe Rachid Ouramdane.

Depuis 2007 et la création de la compagnie L’A., Rachid Ouramdane interroge les rapports entre constructions politiques et sensibilité individuelles à travers une danse qui lorgne du côté du documentaire, dans une démarche proche de celle de Brecht au théâtre. Mobilisant une large variété de moyens d’expression, tels que le mouvement, la musique, la vidéo ou la parole, le chorégraphe entend mettre à jour les mécanismes du monde et la façon dont les discours publics – au sens large du terme – imprègnent la vie et les comportements des citoyens. Dans Exposition universelle, spectacle créé à Bonlieu – Scène nationale Annecy en 2011 et repris lors du dernier festival d’Avignon, Ouramdane se penche plus particulièrement sur les rapports qu’entretiennent histoire de l’art et histoire politique.

Qu’il s’agisse de servir une idéologie ou de dénoncer les mécanismes du pouvoir en place, l’art a toujours entretenu des liens étroits avec le politique, notamment en favorisant une certaine représentation du corps, qui s’est peu à peu infiltrée dans la société.

Des régimes totalitaires à la société capitaliste

Sur un plateau minimaliste où le noir domine, quelques éléments disparates – un spot monté sur pied, des micros, des trépieds, des câbles électriques – sont disposés à même le sol, conférant un aspect technique à la scène, illustration du décryptage auquel Rachid Ouramdane entend s’adonner. Au son d’une musique composée par Jean-Baptiste Julien et mixée sur scène, à partir d’un collage d’hymnes nationaux aux rythmes très martiaux, le chorégraphe met bien évidemment en scène la puissance physique glorifiée par les productions artistiques des régimes totalitaires hitlérien ou stalinien.

Néanmoins, Ouramdane ne s’arrête pas à ces exemples évidents qui pourraient paraître un peu faciles. Ainsi, il s’intéresse également aux images du corps plus insidieuses produites en quasi-permanence par la société capitaliste, notamment à travers la culture populaire, la télévision et la presse. À l’heure où les responsables politiques ne cessent d’interroger l’identité nationale française à des fins plus ou moins électoralistes, Exposition universelle entend dévoiler les stratagèmes mis en place par les nations pour offrir l’image la plus convaincante d’elles-mêmes, aux yeux du monde mais également aux yeux de leurs propres citoyens, n’hésitant pas pour cela à instrumentaliser leurs pires aspects. Ainsi, le titre du spectacle fait allusion à ces grands rassemblements que sont les expositions universelles et aux relents colonialistes et impérialistes qu’ils charrient.

www.mc2grenoble.fr

 

Photo : Patrick Imbert

 

Rachid Ouramdane

_1971_ naissance à Nîmes.
_1992_ diplômé du Centre National de Danse Contemporaine d’Angers.
_1996_ fonde la compagnie Fin Novembre avec Julie Nioche.
_ 2004_ création des Morts pudiques, qui débute sa démarche documentaire avec une réflexion sur les représentations de la mort sur Internet.
_depuis 2005_ associé à Bonlieu – Scène Nationale Annecy
_2007_ fonde la compagnie L’A. Création de Surface de réparation avec des adolescents sportifs de Gennevilliers après une période d’immersion.
_2008_ création de Loin, spectacle dans lequel il explore sa propre histoire familiale, après un travail d’enquête en Indochine notamment.
_2009_ création de Des témoins ordinaires à partir de témoignages de victimes d’actes de torture.
_depuis 2010_associé au Théâtre de la Ville à Paris.
_2011_ création d’Exposition universelle à Bonlieu – Scène Nationale Annecy, reprise au festival d’Avignon.
_2012_ préparation d’un spectacle nécessitant des voyages en Chine, à Taïwan et en Australie.

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