Maudite hermaphrodite

La victoire sur 800 mètres de Caster Semenya aux mondiaux d’athlétisme de Berlin ébranle la discipline et le sport en général. L’athlète serait en effet hermaphrodite.

Le 23 août dernier, le 800 mètres féminin des mondiaux d’athlétisme de Berlin est remporté par une sud-africaine jusqu’alors inconnue, Caster Semenya. Mais cette victoire surprise ne provoque pas l’euphorie souvent observée quand de nouvelles étoiles illuminent soudainement les stades. Depuis les tours précédents, de nombreux commentateurs s’interrogent sur les performances de la jeune athlète, sur sa progression fulgurante et surtout sur son physique atypique. Car Caster Semenya n’a pas les ongles de Gail Divers, ni la longue chevelure d’une quelconque Svetlana : Caster Semenya n’est pas vraiment un archétype féminin, même au milieu des sprinteuses et coureuses de demi fond, pour la plupart très musclées. Même l’ancienne reine du 800 mètres Maria Mutola, au physique pourtant extrêmement masculin, ne générait pas les mêmes soupçons. Car Très vite a surgi cette question : Caster Semenya est-elle véritablement une femme ? Un an avant son coup d’éclat, elle terminait 36ème des championnats du monde juniors : une progression surnaturelle selon certains. Depuis quelques mois déjà, des rumeurs circulaient parmi ses adversaires, selon lesquelles la jeune athlète en pleine progression ne serait pas vraiment une femme. La veille de la finale mondiale, la Fédération internationale d’Athlétisme annonce qu’elle envisage de soumettre Caster Semenya à différents tests pour apprécier son identité sexuelle. Des tests qu’elle n’utilisait plus, comme toutes les fédérations à l’exception de cinq, depuis 1999. Avant cette date, ce que l’on cherchait à identifier, c’était la prise d’hormones. Comme l’explique Philippe Liotard (voir entretien ci-contre), les sportives d’Europe de l’Est manifestement dopées aux hormones dans les années 60 n’ont jamais été soupçonnées d’appartenir au sexe opposé. La mise en cause de l’identité sexuelle d’une athlète est une nouveauté. Car très vite, des voix se sont élevées pour soutenir Caster Semenya dans le procès qui lui était fait, soutenant qu’elle n’avait pas triché.

Boite de Pandore

En effet, selon les dernières informations qui ont filtré (elles ont été rapportées par le Sydney morning herald tribune), la sportive serait bel et bien hermaphrodite. Les rapports médicaux des examens menés par la Fédération indiquent que la jeune Sud-Africaine n’a pas d’ovaires, mais possède au contraire des testicules internes qui produisent de la testostérone. L’hypothèse de la tricherie semble donc être exclue ; néanmoins, selon la fédération toujours, «Caster Semenya dispose d’un avantage médical indéniable sur ses rivales. Il n’y a pas d’annulation automatique des résultats dans un cas comme celui-là». Elle rendra son avis le 20 novembre à l’occasion de son conseil exécutif. Il est probable que la Sud-Africaine ne puisse plus participer aux compétitions internationales, même si on ne lui retire pas sa médaille d’or. Caster Semenya est pourtant bien une femme, identifiée comme telle à l ‘état civil, élevée comme telle depuis son enfance. Cette affaire ébranle plus largement l’athlétisme, et le sport en général, en soulignant le caractère non définitif des catégories qui structurent la compétition. Pourquoi ne pas ainsi mettre en place des catégories de sprint par taille, si les différences de gabarit constituent des avantages ou des inconvénients. Hussein Bolt, qui court aisément dix secondes plus vite au cent mètres que son meilleur adversaire, doit-il concourir avec ceux qui ont des jambes plus courtes ? Celui qui a une plus grande capacité respiratoire n’est-il pas non plus injustement avantagé ? L’affaire Semenya ouvre une boite de Pandore pour le sport de Haut Niveau, dont on sait qu’il est particulièrement normatif.

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