Fier comme un coq ?

110502_4actusimL’affiche de la prochaine Marche des Fiertés parisienne est loin de faire l’unanimité. Mais pourquoi tant de haine ?

Un coq et un boa : il n’en fallait pas plus pour déclencher au sein du mouvement gay et lesbien une polémique comme on n’en avait pas vu depuis des lustres. En cause : l’affiche dévoilée début avril par l’Inter-LGBT, la fédération d’associations qui organise chaque année la Marche des Fiertés parisienne. Sur celle-ci, un coq au plumage d’une blancheur immaculée arborant autour du cou un boa rouge. Un gallinacé, symbole de la France, au teint bien pâlot, est-ce vraiment judicieux à l’heure de la montée en puissance de l’extrême-droite chez les gays et des débats sans fin sur l’identité nationale ou la place de l’islam dans notre pays ? Et le boa, symbole de la “follitude”, ne réduit-il pas les homosexuels à un cliché ? L’Inter-LGBT, par la voix de son porte-parole Nicolas Gougain, se défend de tout «homo-nationalisme» : «détourner un symbole, ça veut dire le débarrasser de son sens pour lui en donner un autre. Est-ce que le logo de l’équipe de France (qui représente lui aussi un coq, NldR) est d’extrême-droite ?»

La guerre des deux roses

Au-delà d’une simple affiche, les débats très vifs qu’elle a suscités sont révélateurs de l’existence, au sein de la “galaxie” gay et lesbienne, de deux pôles antagonistes. Le premier cherche à intégrer homosexuel(le)s, bis et trans au sein de la société française, se montre soucieux d’éviter l’accusation de communautarisme et se présente comme «républicain» (d’où l’utilisation du symbole du coq), attaché aux valeurs d’universalisme garantissant la coexistence pacifique de tous au sein de la communauté nationale. Le second, plus radical, rejette cette position intégrationniste jugé «assimilationniste», déplore une “normalisation” des revendications homosexuelles (mariage, adoption…), ne se reconnaît pas dans les symboles d’une République «nationaliste» qui utilise selon lui le paravent de l’universalisme pour nier les différences et les minorités et déplore une instrumentalisation politique du mouvement associatif gay et lesbien au profit électoral du Parti Socialiste. Quoique minoritaire, inexistant en province et présent surtout à Paris et dans quelques grandes capitales européennes, il peut compter sur ses têtes pensantes (Didier Lestrade, fondateur d’Act Up-Paris et de Têtu, la sociologue Marie-Hélène Bourcier…), son réseau associatif (Les Panthères roses, les Lesbiennes of Color…) et ses organes de diffusion (la revue en ligne minorites.org). Et si, par souci d’apaisement, l’Inter-LGBT a finalement décidé le 19 avril de ne plus utiliser l’affiche controversée pour annoncer la Marche parisienne du 25 juin, gageons que l’enterrement de la hache de guerre entre ces deux pôles n’est que provisoire…

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