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“Moonlight” : trois moments de la vie d’un gay africain-américain

Le film américain Moonlight nous serre la gorge en dépeignant trois étapes de la vie d’un jeune gay africain-américain.

«What is a faggot ?». «Qu’est-ce que c’est, une tapette ?». C’est un tout petit gamin qui demande ça, un gosse solitaire, mutique, boudeur, un gamin comme les autres mais qui sent bien une différence et qui sent bien que les autres gosses la sentent aussi. Un gamin noir d’une ville américaine rongée par la drogue, un fils dont la mère se prostitue pour du crack. Un gamin triste qui ne trouve pas sa place et qu’on insulte. «What is a faggot ?». Le moment pour le spectateur est saisissant. Première bombe émotionnelle d’un film pourtant pudique qui en réserve d’autres. Chiron a sept ans, et toute sa vie va tourner autour de cette question, de la difficulté d’y trouver une réponse. Chiron est le héros de Moonlight, long métrage éblouissant et bouleversant couronné d’un Golden Globe et signé Barry Jenkins, un quasi-inconnu au talent insensé.

«What is a faggot ?»

Devant sa caméra, on va voir Chiron grandir. Ou plutôt, on va saisir Chiron à trois moments de sa vie. Cette enfance donc, pas très heureuse, dans laquelle il trouve un peu de réconfort chez Juan, un doux dealer dont il fait son père de substitution et à qui il pose la question fatidique : «what is a faggot ?». On retrouve ensuite Chiron adolescent, en butte aux violences homophobes de ses camarades d’école, maladroit dans son corps dégingandé, mal à l’aise dans cette identité (gay et noir, noir gay…) qu’il a du mal à identifier, qu’il vit une fois avant d’en être puni et de rentrer dans sa coquille.

«What is a faggot ?». Dans la dernière partie du film, Chiron – incarné par l’over-sexy Trevante Rhodes – a une vingtaine d’années. Il a repris le job de dealer de Juan. Il est toujours seul. Il a construit son corps comme une cuirasse de muscles, comme une arme de guerre pour ne plus être bousculé, pour ne plus être moqué, ne plus être traité de faggot. Mais il suffit d’un rien, d’un coup de fil, d’un repas cuisiné avec tendresse, d’un regard, pour que Chiron redevienne le gamin sensible du début et cette séquence saisit à la gorge tellement elle est belle. Tellement elle ouvre des horizons. Tellement elle dit, contrairement à tant d’autres films à travers l’histoire, que même si c’est dur d’être un faggot – et plus encore un pédé africain-américain pauvre –, ce n’est ni impossible, ni une impasse dans la quête du bonheur.

Quête de soi

Moonlight est une merveille. Sans réserves. Un grand film, esthétiquement aussi. Un des plus enthousiasmants sur la question LGBT depuis des années, tant il touche au cœur en visant l’essentiel à travers cette question : non pas «what is a faggot ?», mais comment devenir soi ?

 

Moonlight de Barry Jenkins. Sortie le 1er février. Bande-annonce ici.

 

Projection vendredi 14 avril à 20h30 à l’Auditorium de Seynod, place de l’Hôtel de Ville-Seynod / 04.50.52.16.46 / www.auditoriumseynod.com
Dans le cadre du festival Tranposition

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