En Une (septembre 2010)
Becky Rausch, Yarn, 2010
«Nulla dies sine linea» («pas un jour sans une ligne») : cette formule de l’auteur romain Pline l’Ancien était la devise d’Émile Zola. Pour la faire sienne, la photographe anglaise Becky Rausch l’a quelque peu modifiée : son credo à elle, ce serait plutôt «pas un jour sans une photo». Peu importe l’appareil, pour elle, il s’agit presque d’un exercice de santé quotidien qui lui permet de garder intacts sa créativité et son imagination. Dans Yarn («pelote de laine» en anglais), l’étrangeté naît de la bizarrerie du cadrage : on ne sait trop si l’on doit incliner la tête à droite, à gauche, ou la garder bien droite pour lire cette photo. Et le doute, imperceptiblement, finit par s’insinuer derrière la douceur apparente de l’image : ces grosses boules pelucheuses et multicolores ont-elles été simplement photographiées de biais ou sont-elles en train de s’effondrer sur nous ? Et l’étouffante masse bleue sur le côté droit de l’image, avec ses minuscules tentacules qui la font ressembler à quelque créature des bas-fonds de l’océan, est-elle réellement aussi douce et inoffensive qu’elle en a l’air ? Au spectateur d’en juger, en gardant toutefois à l’esprit cette autre maxime latine : «non inultus premor», autrement dit «qui s’y frotte s’y pique» !
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