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Renate Costa honore la mémoire des gays paraguayens assassinés dans “Cuchillo de Palo (108)”

La première édition du festival Écrans Mixtes débute ce mercredi soir avec la projection, en avant-première, d’un film paraguayen qui a fait sensation lors de sa projection au dernier festival de Cannes, Cuchillo de Palo (108), de Renate Costa. L’un des organisateurs du festival, Ivan Mitifiot, nous présente ce film qui rend hommage aux 108 homosexuels arrêtés et torturés durant la dictature d’Alfredo Stroessner (1954-1989).

Cuchillo de Palo (108)L’énigmatique titre du film de Renate Costa, Cuchillo de Palo (108), fait référence au nombre d’homosexuels assassinés par les autorités paraguayennes durant les trente-cinq ans de la dictature d’Alfredo Stroessner. 108 est également le nom de code du régime pour désigner les homosexuels masculins. Rodolfo n’a jamais voulu être forgeron comme son père et ses frères. Il voulait être danseur. Il a été retrouvé mort dans de mystérieuses circonstances, entièrement nu, chez lui. Il ne faisait pas partie de la liste des 108 officiellement répertoriés, mais des 109, 110, sûrement plus, combien d’autres ? Il figurait en revanche sur une longue liste d’homosexuels arrêtés et torturés par la police paraguayenne. Sa nièce, Renate Costa, prend sa mini-caméra et part à la rencontre des membres de sa famille et de ses amis, afin de dresser un portrait de cet oncle qu’elle a peu connu.

Cuchillo de Palo (108) est donc un documentaire familial. Renate Costa ouvre son film sur des images d’Asunción, capitale du Paraguay, «une ville qui tourne le dos au fleuve». Le film ne parlera que de ça : du silence, de l’absence, du mutisme, de la honte. On tourne le dos, comme ces tristes images de fête familiale, où l’on voit clairement Rodolfo isolé des autres membres de la famille. Du côté familial, précisément, aucun des oncles de la cinéaste n’a souhaité participer au film. Seul son père, et frère de Rodolfo, ne comprenant pas vraiment l’objet du documentaire, acceptera de se confier : «Rodolfo était un pécheur, il aurait dû choisir la bonne voie».

Devoir de mémoire

Les séquences d’entretien avec son père sont pesantes, insupportables de mutisme, de silences, de non-dits. La cinéaste rencontre aussi les amis de Rodolfo, des travestis, des prostitués, des homosexuels qui comme lui figuraient sur les listes d’arrestation et redonne la parole à ceux qui en furent privés pendant des décennies. Humiliations, tortures, arrestations, les témoignages sont insupportables et le regard que leur porte la cinéaste est d’une pudeur absolue. Cuchillo de Palo (108) est un film sur le gouffre des générations. Le film a été présenté à Cannes par l’ACID (Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion), afin de trouver un distributeur. Aujourd’hui le film existe, et se doit d’être distribué et montré au public. Au même titre que le documentaire Paragraphe 175 sur la déportation des homosexuels, Cuchillo de Palo (108) se veut un devoir de mémoire, pour tous les homosexuels du monde entier.

 

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