Mélange des genres

101203_8thtreCabaretim1auchoixTatouageCopyrightPacmePoirierCoup de projecteur sur la deuxième édition du festival Tempo Cabaret au Théâtre de la Renaissance à Oullins.

Le cabaret occupe indéniablement une place particulière dans l’imaginaire LGBT. Pas seulement parce que Cher devrait prochainement faire son grand retour au cinéma (aux côtés de Christina Aguilera) dans une comédie musicale comme Hollywood en a le secret et qui répond au doux nom de Burlesque. Ni même uniquement à cause de l’interprétation du personnage de Sally Bowles par Liza Minnelli dans le film Cabaret de 1972. Dès son origine, qui remonte à la fin de la Révolution française, le cabaret est un endroit hybride : on peut, dans le même temps, s’y restaurer et assister à un spectacle et les classes sociales y sont momentanément abolies, riches et pauvres s’y côtoyant indifféremment. C’est sans doute cette particularité qui en fait un lieu profondément queer. Mais le cabaret, c’est également l’exposition des corps magnifiés par les plumes et les paillettes, la confrontation des disciplines artistiques et l’irrévérence des comiques troupiers et des chansonniers. Symbole de la liberté de ton et de l’ouverture d’esprit de la République de Weimar dans les années 20, victime dans l’entre-deux-guerres de la montée du nazisme, le cabaret est un espace pour ceux et celles qui souhaitent échapper aux carcans que leur impose une société rigide. C’est sans doute pourquoi le cinéma, et plus particulièrement Hollywood, s’est emparé de cet univers afin de construire des récits initiatiques où la soif d’émancipation sert de moteur aux personnages.

Cinq soirées interlopes à la Renaissance

Afin d’en apprendre un peu plus sur ce genre aux contours mal définis, le Théâtre de la Renaissance à Oullins, qui a fait du théâtre musical sa spécialité, accueillera du 14 au 18 décembre 2010 la deuxième édition du festival Tempo Cabaret. Durant cinq soirées, l’établissement dirigé par Jean Lacornerie fera la part belle au spectacle vivant sous toutes ses formes, mettant à l’honneur l’impertinence et la force subversive du cabaret. Les festivités s’ouvriront sur deux duos : celui de Franz, où se répondent une pianiste de concert et un clown, et celui d’À la dérive, où se rencontrent chanson réaliste, jazz et improvisation. Deux pièces d’Alfredo Arias seront également jouées. Tatouage retrace l’histoire de la “folle rouge“ Miguel de Molina qui, après avoir côtoyé des milieux interlopes et chanté pour les soldats républicains, a connu une vie d’exil à la merci des dictatures espagnole et sud-américaines. Cabaret Brecht Tango Broadway, pour sa part, fait le lien entre les musiques de Kurt Weill et les États-Unis, entre les chansons des années 20 et les classiques du rock. Le 15 décembre, Marie Dubas, de haut en bas, tour de chant mis en scène par Vincent Vittoz et interprété par Edwige Bourdy, sera l’occasion de (re)découvrir le répertoire de Marie Dubas, chanteuse française qui émergea dans les années 30 et qui servit de modèle à Édith Piaf. La comédie musicale américaine, mal connue et souvent injustement dépréciée en France, sera elle aussi à l’honneur avec le spectacle Applause : Broadway notre monde, mis en scène par Jean Lacornerie, qui devrait notamment revisiter les standards de Cole Porter, du film Les Producteurs de Mel Brooks ou encore de Kurt Weill. Enfin, le Groupe Incognito, collectif qui réunit de jeunes artistes majoritairement issus de l’École du Théâtre National de Strasbourg, clôturera le festival en présentant Le Cabaret des Utopies, spectacle qui cherche à sonder les aspirations des trentenaires de notre époque à travers le chant, la manipulation d’objets, la performance ou encore l’“agit-prop“ (théâtre ouvrier et politique). En cinq soirées, c’est donc le cabaret dans son acceptation la plus large que se propose de célébrer le Théâtre de la Renaissance, invitant les spectateurs à effectuer un voyage dans le temps et l’espace au cours duquel les règles du genre (artistique) seront questionnées, malmenées et remodelées, afin de faire naître un espace de création plus à même d’interroger la complexité du monde. Car, finalement, malgré son caractère un peu fourre-tout, c’est bien à cela qu’aspire le cabaret : rendre possible l’émancipation de chacun. Alors reprenons tous en chœur avec Liza : «life is a cabaret».

www.theatrelarenaissance.com

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