Édito de septembre

110904_H59«Je l’ai fait pour lutter à ma manière contre l’homophobie.»
(Samy Messaoud à propos de son clip Je suis gay, Têtu.com, 8 juillet 2011)

Avec l’essor des nouvelles technologies, du Web 2.0 et des réseaux sociaux, on a vu apparaître ces dernières années de nouveaux moyens de communication dont certains ont aussitôt été mis au service de la lutte contre les discriminations : clips, kiss-in, flash-mobs, party-gatherings et autres anglicismes à la mode destinés à créer le buzz. Dernier exemple en date : le clip du chanteur Samy Messaoud, dans lequel il apparaît entièrement nu pour interpréter des paroles dont le ridicule le dispute à l’esthétique résolument cheap des images. Devant un cas aussi extrême, on en vient à se demander si les petits génies de la com’ et quelques militants sincèrement bien intentionnés n’auraient pas sacrifié le fond à la forme, le contenu au média et l’obligation de résultats à l’impérieuse envie de «faire quelque chose», n’importe quoi, quitte à brasser beaucoup de vent. À côté des actions de prévention réellement efficaces (comme les Interventions en Milieu Scolaires menées par certaines associations), combien se contentent de prêcher des convertis ? Combien semblent destinés davantage à faire plaisir aux médias et aux associations communautaires qu’à changer les choses, concrètement, sur le terrain, là où l’homophobie se manifeste ? Le contraste entre la lutte contre l’homophobie et la lutte contre le sida apparaît ici de façon flagrante : il y a bien longtemps que les militants anti-VIH ont en effet pris en compte la nécessité d’adapter aussi bien leurs discours que leurs actions aux spécificités de chaque public visé (prostitué(e)s, toxicomanes, homosexuels, migrants…). De la même façon, pour combattre efficacement l’homophobie, il conviendrait de se demander avant toute chose où celle-ci se niche à l’heure actuelle, quels sont les publics auxquels s’adresser en priorité, comment parvenir à les surprendre, plutôt que de se satisfaire de messages trop généralistes qui manquent leur cible neuf fois sur dix. Parce que les bonnes intentions ne suffisent pas, aucune cause, même la plus louable, ne peut se dispenser d’un «audit» régulier de ses actions : il en va du sens et de l’utilité même du riche tissu associatif gay et lesbien français.

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