Une Barbe un peu trop courte

Associée à la sagesse et à la respectabilité, la barbe était sous la Troisième République l’accessoire indispensable de la quasi-totalité de la classe politique, exclusivement masculine cela va de soi (les femmes n’ayant acquis l’éligibilité, ainsi que le droit de vote, qu’en 1944). Si son port est quelque peu tombé en désuétude depuis, la parité entre hommes et femmes est encore très loin d’être acquise : avec ses 109 femmes sur 577 députés, la France figure au 59e rang mondial pour la représentation des femmes au Parlement et la situation n’est guère plus brillante dans les conseils d’administration des grandes entreprises, à l’Université ou encore dans les théâtres. C’est contre cette inégalité de fait que s’est monté en 2008 le groupe d’action féministe La Barbe. Le mode d’action de ses militantes consiste à s’introduire, affublées d’une barbe postiche, dans des assemblées (quasi-)exclusivement masculines pour dévoiler leur phallocratie. S’inscrivant dans une nouvelle dynamique du mouvement social, qui entend dénoncer par le rire (à l’instar des «manifs de droite» ou du collectif Sauvons les riches), La Barbe en partage la vitalité mais aussi les limites : en se cantonnant à rendre visible des injustices bien réelles sans réellement s’interroger sur la façon d’y remédier, ce collectif aux intentions louables peut parfois donner l’impression d’enfoncer des portes ouvertes, voire de brasser beaucoup de vent sans proposer de réelles solutions.

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