Une boom mais sans Vic

La Maison de la Danse met à l’honneur les grands noms de la danse française et européenne des années 80 à l’occasion du festival Le Boom des années 80.

Souvent injustement réduites à l’éclatement de couleurs fluo criardes et à l’omniprésence d’épaulettes surdimensionnées, les années 1980 ont pourtant permis l’éclosion d’un foisonnement artistique d’une réelle intensité. Décennie porteuse d’espoirs après l’élan libératoire des années 70, brisée par les difficultés économiques et l’apparition brutale du sida, elle aura été le berceau de l’émergence d’artistes majeurs, notamment en photographie ou en théâtre. Durant cette période, la danse n’est pas en reste. À Lyon, la Maison de la Danse voit le jour en 1980 et semble marquer le lancement d’une nouvelle génération de chorégraphes qui essaiment un peu partout en Europe. C’est cette ferveur artistique, portée par la nouvelle danse française, qu’entend nous faire (re)découvrir le festival Le Boom des années 80. Du 10 janvier au 3 février, neuf spectacles – emblèmes et hommages – sont proposés aux spectateurs lyonnais qui pourront notamment se confronter à la genèse des œuvres de Joëlle Bouvier et Régis Obadia, d’Anne-Teresa de Keersmaeker ou encore de Jean-Claude Gallotta.

Au carrefour des arts

Alors que Pina Bausch crée Nelken en 1982 avec le Tanztheater, la danse européenne se pose en interlocuteur privilégié de diverses pratiques artistiques. Ainsi, le duo Welcome to paradise de Joëlle Bouvier et de Régis Obadia, créé en 1989 et repris par le Ballet de Lorraine en 2011, irradie de l’influence cinématographique. Ouvertement inspiré du cinéma néoréaliste italien, le spectacle adopte une structure proche du 7e art afin de retracer l’évolution des sentiments au sein du couple. Chez la Flamande Anne-Teresa de Keersmaeker, ce sont les liens entre musique et mouvement qui ne cessent d’être explorés. Le spectacle Fase, four movements to the music of Steve Reich (1982) est construit sur le principe de répétition au cœur du travail du compositeur américain. L’artiste belge trouve là le moyen de développer son propre langage chorégraphique autour du corps féminin. Les motifs de la ligne, de la diagonale et du cercle qu’elle met sur pied dans ses travaux de jeunesse constituent la base de travail de Rosas danst rosas, spectacle pour quatre danseuses créé en 1983 et qui accompagne la naissance de la compagnie Rosas. Enfin, Mikrokosmos (1987) est le témoignage de l’intérêt que Keersmaeker porte à la musique de Béla Bartók, compositeur hongrois du début du XXe siècle, source d’inspiration de plusieurs de ses spectacles.

Un panorama le plus large possible

Devant l’impossibilité de rendre compte de toute la production chorégraphique des années 80 en seulement trois semaines, la Maison de la Danse a dû se montrer inventive. Ainsi a-t-il été fait appel à Josette Baïz et à son projet Grenade. Après avoir été danseuse pour Gallotta dans les années 80, Baïz s’est consacrée à la transmission de la danse contemporaine, notamment dans les quartiers nord de Marseille. Là, confrontée à une grande variété de danses et de cultures, elle a créé la compagnie Grenade, où se mêlent danse contemporaine, techniques classiques, hip-hop et danses ethniques. Du 24 au 26 janvier, avec ses interprètes de tous âges, elle revisitera trente ans de création chorégraphique en reprenant des extraits de spectacles de Découflé, Gallotta, Kelemenis, Bel, Preljocaj, Maillot et Lagraa.

Hommage au chantre de la mémoire chorégraphique

Enfin, difficile d’imaginer un festival consacré à la danse des années 80 sans mentionner Jean-Claude Gallotta, chorégraphe installé à Grenoble qui n’a de cesse d’inventer de nouvelles manières de rendre vivante la mémoire de la danse. Des années 1980, seul son duo Daphnis é Chloé sera proposé à la Maison de la Danse, aux côtés du Sacre du printemps, création de 2011. Néanmoins, le véritable travail de mémoire devrait prendre corps à travers le spectacle Racheter la mort des gestes – Chroniques chorégraphiques 1, créé en octobre dernier au Théâtre de la Ville et repris le 3 février à la Maison de la Danse. Faisant référence au titre de l’article publié dans Le Monde par Hervé Guibert en 1984 sur le travail de Gallotta, il s’agit d’une sorte de collection de souvenirs, notamment du séjour de l’écrivain-photographe à Grenoble, composé de divers emprunts aux précédents spectacles de Gallotta, sur le modèle du found footage cinématographique qui consiste à créer un film à partir de morceaux de pellicules d’autres films.

Le Boom des années 80, du 10 janvier au 3 février à la Maison de la Danse, 8 avenue Jean Mermoz-Lyon 8 / 04.72.78.18.18 et au Toboggan, 14 avenue Jean Macé – Décines / 04.72.93.30.14. Programme complet sur www.maisondeladanse.com

L’héritage de Pina Bausch d’Anne Linsel, disponible en replay jusqu’au 8 février 2021 sur le site d’Arte

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