Parce qu’il n’y a pas que Johnny Clegg dans la vie…

Alors que l’Afrique du Sud est à l’honneur en France en cette fin d’année, la Maison de la Danse a décidé d’apporter sa pierre à l’édifice en proposant trois spectacles d’artistes sud-africains en novembre.

Nulle part comme en Afrique du Sud la danse ne semble aujourd’hui être aussi consciente de son pouvoir politique. Il faut dire que la danse sud-africaine contemporaine, portée par quelques compagnies qui écument les scènes internationales, puise directement ses racines dans les danses populaires des townships, durement réprimées sous l’apartheid. Inspirés par la pantsula et les danses zouloues de leurs parents, les artistes sud-africains contemporains continuent de dénoncer les inégalités et les injustices que la société arc-en-ciel n’est pas parvenue à éradiquer. En programmant en novembre trois spectacles d’artistes d’Afrique du Sud, la Maison de la Danse offre un panorama de la vitalité et de la créativité de la danse dans ce pays du bout du monde. Ainsi, la compagnie Via Katlehong vient présenter son nouveau spectacle intitulé Sophiatown, en référence à un quartier de Johannesburg qui a vu naître nombre de styles de musiques et de danses dans un esprit multiracial et contestataire, avant d’être rasé par les autorités dans les années 1950. Utilisant les rythmes et les pas de la pantsula, véritable culture alternative des townships sous l’apartheid, du gumboot, danse contestataire des mineurs noirs consistant à taper sur ses mollets et ses cuisses, mais aussi le tsaba-tsaba ou le kofifi, les danseurs de Via Katlehong entendent célébrer l’esprit de rébellion apparu à Sophiatown et dénoncer les conditions de vie des jeunes noirs d’aujourd’hui, toujours coincés dans les townships, loin du centre-ville et de ses opportunités.

 

La condition des femmes et des homosexuels en question

En outre, dans un pays où le nombre de viols est tristement élevé et où l’homophobie est monnaie courante, de nombreux artistes s’emparent de ces questions, confrontant la société sud-africaine à sa propre violence et à ses propres peurs. C’est notamment le cas de Dada Masilo, découverte par le public lyonnais lors de la dernière Biennale de Danse et qui revient avec son spectacle Swan Lake, dans lequel Siegfried se révèle être gay. Forte de sa culture sud-africaine et de sa formation à Bruxelles dans l’école d’Anne Teresa de Keersmaeker, Dada Masilo mélange les traditions africaines et occidentales, transformant le ballet romantique en une ode à la diversité et à la tolérance. De son côté, Mamela Nyamza, danseuse féministe plutôt habituée à des formes proches de la performance, s’associe au Soweto’s Finest, jeune troupe composée de cinq garçons âgés de 18 à 26 ans, afin de poursuivre sa réflexion autour de la condition féminine et du corps. Entre les considérations de l’artiste expérimentale et la danse ishbuja des jeunes hommes post-apartheid qui cherchent à liquider l’héritage pantsula, c’est la société sud-africaine dans sa plus grande complexité qui est donnée à voir, loin des clichés essentialistes de retour en force sous nos latitudes.

Temps fort Afrique du Sud, jusqu’au 18 novembre à la Maison de la Danse, 8 avenue Jean Mermoz – Lyon 8 / 04.72.78.18.18

Photo : Sophiatown, spectacle de la compagnie Via Katlehong © Annely Boucher

 

À voir :

Sophiatown, du 5 au 8 novembre

Swan Lake, du 13 au 17 novembre

Mamela Nyamza et les Kids de Soweto le 18 novembre

 

Approfondir :

Vidéo de présentation de Mamela Nyamza et des Soweto’s Finest

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