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Weinstein et cie : il faut croire les victimes de violences sexuelles

Plutôt que d’exiger d’elles des “preuves” souvent impossibles à fournir, il faut entendre et croire les victimes de violences sexuelles qui s’expriment dans la foulée de l’affaire Harvey Weinstein.

Pour ça, on en aura lu et entendu, des réactions stupides et sexistes (émanant quasi-uniquement d’hommes) à l’affaire Harvey Weinstein et à la salutaire libération de la parole des femmes qui l’a suivie.

Il y a ceux qui reprochent aux victimes de ne pas porter plainte. Celui qui compare la dénonciation des agresseurs à la délation sous l’Occupation – ou, pour rester dans le registre des comparaisons historiques absolument pas pertinentes, à un lynchage ou à une chasse aux sorcières. Celui qui juge le moment opportun pour réhabiliter les suidés. Celui qui affirme sans ciller qu’il ne dénoncerait pas un agresseur sexuel s’il en connaissait un – avant de se raviser quelques heures plus tard devant le tollé. Ceux qui, malgré l’avalanche de témoignages du contraire, n’arrivent toujours pas à se représenter un agresseur sexuel autrement que sous les traits d’un jeune en jogging et casquette.

Ceux qui pensent que c’est un complot des sionistes et celui qui trouve que, décidément, il y a beaucoup de sionistes parmi les soutiens des agresseurs. Celui qui met en avant un agresseur plutôt qu’un autre parce qu’il s’agit d’un ennemi politique et celui qui, à l’inverse, prend la défense d’un autre parce qu’il s’agit d’un ami. Et celle qui, avant de tirer définitivement – du moins on l’espère – sa révérence politique, prend la défense de la grivoiserie, qui «fait partie de l’identité française»…

Les violences sexuelles restent souvent impunies

L’une des réactions les plus répandues consiste à exiger des victimes d’agressions sexuelles qu’elles fournissent des preuves irréfutables de ce qu’elles avancent – ou se taisent à jamais. C’est évidemment prendre le problème à l’envers. Non seulement l’absence de «preuves» n’est pas une excuse pour détourner le regard, mais c’est peut-être même un motif supplémentaire d’écouter et de croire les femmes qui ont le courage de révéler publiquement ce qu’elles ont subi.

Cette absence de «preuves», qui caractérise tant d’agressions sexuelles, est en effet l’une (mais pas la seule) des raisons pour lesquelles elles sont si mal et si partiellement réprimées. La très grande majorité des viols et des agressions sexuelles ne sont pas signalés à la justice : selon l’INSEE, seul un dixième des femmes de 18 à 59 ans victimes de viol ou de tentative de viol portent plainte.

Pire encore, même quand ils sont jugés, la majorité des agresseurs échappent à toute condamnation. Parce que la plupart des violences sexuelles n’ont pas de témoin, parce que toutes ne laissent pas forcément une trace physique incontestable et parce que c’est souvent parole contre parole – au risque d’une inversion des rôles, qui voit les agresseurs menacer leurs victimes d’un procès en diffamation. Pour toutes ces raisons, il est absolument impératif de croire de façon inconditionnelle celles et ceux qui racontent aujourd’hui leur calvaire.

Tous les hommes sont concernés

Tout comme il est nécessaire que l’affaire Harvey Weinstein et ses répercussions amènent tous les hommes sans exception à un profond examen de conscience. Rien ne serait pire que de penser «je ne suis pas concerné puisque je n’ai jamais violé». Ou «puisque je suis gay». Même sans désirer les femmes, un homme peut se croire autorisé à leur mettre une main aux fesses «pour rire» (sic) ou pour asseoir sa domination. Et le harcèlement sexuel existe aussi entre hommes, favorisé comme partout par les écarts d’âge, de pouvoir ou de richesse – comme est venue le rappeler l’affaire Kevin Spacey. Seule une prise de conscience de tous peut donc éviter que le mouvement qui s’est levé avec le hashtag #MeToo ne s’éteigne comme un feu de paille.

 

Photo : Harvey Weinstein © Thomas Hawk

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