chroniques lyonnaises du presque futur © cyril da vieira

Chroniques lyonnaises du presque futur #6

Puisque le mois de février est le plus court de l’année, j’ai décidé d’accélérer mon programme de rencontres. Je me suis fixé un objectif précis : baiser. Avec sélection exigeante. Resserrons les écrous de la qualité, merci.

 

Top 5 de mes amant·es :

Il y a le duo rencontré à la pleine lune l’année dernière. L’extraordinaire Sapphire dont les tatouages bleus pulsent en fonction du rythme cardiaque et de l’excitation. Et l’imposant Lycra, qui englobe le monde, mange tout ce qu’il peut : nos bouches, nos mains, nos sexes. Ensemble, nous sommes puissant·es.

Il y a Onyesonwu, l’agente de sécurité. Déesse musclée aux longues tresses roses qui m’a chopé en train de voler un rouge à lèvre. Elle m’a demandé : tu fais quoi ? Je lui ai répondu : je me fais prendre la main dans le sac.

Il y a l’adolescent qui m’a dragué·e avec un aplomb, jamais vu ça. A la station Bellecour entre deux métros. 17 ans, magnifique chevelure. Après le sexe debout dans les toilettes gare de Vaise, je lui ai posé beaucoup de questions sur sa routine capillaire. Se faire un shampoing est une pratique humaine que j’envie terriblement.

Il y a le boxeur. Corps blond, que du muscle, sec, sueur, il sent l’herbe et m’invite à passer la nuit chez lui. Nous buvons une vodka histoire de dire, puis nous commençons le sparring. Nous combattons dans la même catégorie. Rapprochement des corps, front contre front, mains sur les nuques, nous voilà dans le lit. Nous jouissons vite, deux fois, je ne veux pas me mettre en pause, je me sens bien, il dort, j’attends. Il se réveille, je le suce. Corps vif qui jouit easy, impec. C’était parfait, mais je décide de ne pas le revoir. En buvant son café, il me dit « ne t’attache pas ». Prétentieux.

Enfin, il y a K., qui, comme moi, est non-binaire. K. a une voix très radiophonique que j’ai archivée dans mon enregistreur intégré, sans qu’iel s’en aperçoive. Parfois, quand le sens de ma mission m’échappe, quand j’oublie les raisons de ma présence à Lyon, les desseins de mon existence, je l’écoute. La voix m’apaise. Et puis, c’est drôle car, pur hasard, j’ai enregistré K. en train de raconter une blague sur les robots (autre chose que j’envie à l’espèce humaine : faire des plaisanteries. Moi, je suis toujours un peu à côté de la plaque).

« C’est un robot qui entre dans un bar. Que voulez-vous boire ? demande le barman. J’ai besoin d’un truc qui me détende un peu. Le barman lui sert un tournevis. »

Ah ah. J’adore K. J’espère que nous allons nous revoir.

 

Polaire, reporter humanoïde

Février 2020

 

© Illustration : Cyril Vieira Da Silva

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