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Édito #161 : Survivre ?

Née en 1929 au sein d’une famille juive ashkénaze d’origine polonaise, Régina Zylberberg fut notamment cachée pendant la Seconde guerre mondiale à Lyon par une famille de blanchisseurs. Elle fut même sur le point d’épouser le neveu du Grand Rabbin de la ville avant que celui-ci ne soit arrêté par la Gestapo et ne meurt en déportation.

Pourtant, de cette femme, on connaît plutôt le pseudonyme synonyme de fêtes et de strass, Régine. L’interprète de La Grande Zoa s’est éteinte le 1er mai dernier, à l’heure même où les forces progressistes tentaient de mobiliser leurs troupes dans la rue suite à un second tour de l’élection présidentielle où le score de l’extrême droite n’a jamais été aussi haut.

Alors évidemment, il ne s’agit pas d’être angélique : Régine, c’était aussi un business, des boites et des hôtels à travers le monde et une gouaille sans fioritures qui n’était pas toujours à l’abri d’un dérapage. Mais celle à qui Gainsbourg faisait chanter Les Femmes ça fait pédé a été l’une des premières à faire appel à des DJs, que l’on appelait alors encore disc-jockeys, créant un espace de liberté propice au développement d’une culture propre à la nuit. Celle qui fut surnommée « la reine noire de nos nuits blanches » par Françoise Sagan a participé dès les années 50 à la transformation profonde du monde de la nuit et il y a fort à parier que nos soirées LGBT+ d’aujourd’hui n’auraient pas le même visage sans elle.

On pourra toujours se consoler de ce décès avec l’ouverture dans quelques jours à peine, à Turin, de l’édition 2022 de l’Eurovision, cette manifestation mainstream qui ne cesse néanmoins de jouer sur les codes des identités de genre et des sexualités au fil des ans, atteignant désormais le statut d’équivalent queer de ce que peut être la Coupe du monde de foot pour les hétéros. On y retrouvera notamment le duo italien formé par Mahmood et Blanco, interprétant Brividi, chanson victorieuse du dernier Festival de Sanremo prônant l’amour sous toutes ses formes.

Enfin, on s’évitera des frissons moins agréables en n’oubliant pas que des élections législatives se déroulent en France les 12 et 19 juin et que malgré leurs atermoiements d’avant présidentielle, les formations de gauche ont enfin compris que l’union était indispensable pour espérer être présent·es au second tour (et accessoirement pour conserver les financements de leurs partis respectifs). Est-ce l’écoute intempestive de Je survivrai de Régine qui les a guidé·es sur la voie de la raison ?

Soirée de lancement aux Subs le 11 mai 2022 à partir de 18h / Lien vers l’événement Facebook.

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Une © Nadia Khallouki

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