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Salam : Mélanie après Diam’s

Anne Cissé est scénariste (Lupin, Vampire) et réalisatrice de courts et longs-métrages. Cette année, elle signe avec Houda Benyamina (Divines) la co-réalisation et co-écriture du documentaire Salam sur Mélanie Georgiades, aka Diam’s, dans lequel l’ex-rappeuse revient pour la première fois sur sa carrière, ses problèmes de santé mentale, sa quête de la paix et sa rencontre avec l’Islam. À l’occasion de la projection du film en Séance Spéciale du Festival de Cannes 2022, Hétéroclite est allé la rencontrer.

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Anne Cissé

Comment vous êtes-vous retrouvée sur ce film ?

Anne Cissé : Ça faisait 10 ans que Mélanie était approchée par des boîtes de production qui lui suggéraient de faire de la fiction autour de son récit, et qui voulaient raconter son histoire comme ça : « Diam’s la rappeuse qui a tout, dont la carrière s’arrête, qui se convertit à l’Islam et fin de l’histoire ». Mélanie voulait justement raconter l’après, parce que c’est ça qui est intéressant et qu’on n’a jamais raconté. Quand notre producteur lui a proposé une carte blanche pour faire un film, elle a réalisé qu’elle avait un vrai désir de cinéma, et a contacté Houda Benyamina. On m’a appelée à ce moment-là, pour les aider à structurer le récit. Dès le départ, on s’est dit que ça allait être une création cinématographique, pas un reportage. On s’est isolées dans une maison à Marrakech toutes les trois, et le film est né de cette semaine passée ensemble. 

La question de revenir sur le passé musical de Mélanie ne s’est donc jamais posée ?

Non, dès le début, c’était évident. Aujourd’hui, vous tapez Diam’s sur Google, vous trouvez des millions de vidéos et d’articles. Celles et ceux qui ont envie de se plonger dans l’époque Diam’s avec nostalgie ont accès à ces images, c’est facile de retracer sa carrière et beaucoup de documentaires musicaux l’ont déjà fait. C’est peut-être ça qu’il faut rappeler aux gens. Ce n’est pas un documentaire musical, c’est l’histoire d’une femme qui a tout eu, qui n’a pas trouvé le bonheur dans la gloire, le succès, l’amour du public, et qui s’est cherchée ailleurs. Pour Mélanie, c’est aussi ça qui est beau, montrer qu’on peut trouver le bonheur ailleurs que dans ce que nous imposent les diktats de la société. 

Les proches de Mélanie et leurs témoignages ont une place importante dans Salam. Comment les avez-vous choisis ?

C’est Mélanie qui les a choisis. Dans les documentaires existants, beaucoup de personnes ont pris la parole sur l’histoire de Diam’s. Elle s’est dit « il y avait des gens qui étaient vraiment là, à des moments importants de ma vie, qui n’ont pas pris la parole parce qu’ils étaient si proches qu’ils ont respecté mon silence. Et je voudrais que ce soit ces personnes qui parlent de moi, parce qu’elles ont vu des choses ».  

Lorsqu’elles prennent la parole, ces personnes sont entourées de noir, on ne voit que leur visage. Pourquoi ce choix de mise en scène ?

J’ai mené les interviews en tête à tête avec elles, et une équipe technique plongée dans le noir. Parce qu’à part Vitaa, ce sont des personnes de l’ombre. Donc il fallait les mettre dans un dispositif qui soit le plus à même de recueillir leur parole, et de respecter la gravité, parfois, des propos tenus. Pour les premières personnes interviewées comme sa maman, Charlotte [Vitaa] et Nicole [manageuse], on avait plusieurs valeurs de plan. Et on s’est vite rendu compte qu’il se passait beaucoup dans les visages sur les plans serrés. Et aussi qu’en forçant les gens à regarder les visages des intervenant·es, alors quand Mélanie apparaît à l’écran, peut-être qu’on oublie son voile. J’ai l’impression que ça fait cet effet là aux gens et c’était l’objectif. On oublie ce vêtement, qui a fait tant polémique.

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Y a-t-il eu d’autres idées mises en scène qui racontaient en elles-mêmes quelque chose ?

Houda a eu l’idée d’emmener Mélanie au Zénith. C’était important de créer quelque chose, parce que c’est aussi ça le documentaire : il y a ce qu’on va raconter, mais il faut aussi laisser le réel et le présent prendre leur place. On a amené Mélanie au Zénith, et on a laissé tourner. C’était un moment hyper intense, parce qu’elle était émue, mais de manière très apaisée. Elle était heureuse d’être là, sans aucun regret pour ce qu’elle a été. Elle accepte, elle ne renie pas Diam’s, mais se dit que c’est une page de son histoire, qui l’a rendue heureuse, malheureuse. On a aussi filmé les grands paysages. Il fallait montrer la façon dont Mélanie se voit si petite dans la grandeur de ce monde. Elle considère qu’elle est un être parmi tant d’autres, donc il fallait la filmer dans ces grands espaces qui l’ont marquée. On s’est demandé comment faire, avec quel outil technique, et on a tourné au drone alors qu’on ne l’avait jamais fait.

À voir

Salam de Mélanie Georgiades “Diam’s”, Houda Benyamina et Anne Cissé. Disponible sur la plateforme vidéo Amazon Prime.

© Black Dynamite

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