“L’Arbre et la forêt”, nouveau film de Ducastel et Martineau

Avec L’Arbre et la forêt, Olivier Ducastel et Jacques Martineau évoquent une tragédie longtemps occultée, celle de la déportation homosexuelle.

Le titre le dit d’emblée : il y a un secret dans cette histoire, un secret masqué par les apparences, une forêt de secrets dissimulée derrière un arbre. Et c’est la levée, d’abord progressive puis brutale de ce(s) secret(s) à la suite d’un décès – celui du fils aîné du héros septuagénaire incarné par Guy Marchand, comme par hasard un sylviculteur – qui sert de moteur à L’Arbre et la forêt, beau film grave, qui a valu à ses réalisateurs un Prix Jean Vigo et une sélection à Berlin amplement mérités.

Est-ce déflorer ce drame familial que de révéler au moins une part de ce secret et de dire qu’il a un rapport avec l’homosexualité, et plus encore avec la déportation homosexuelle ? Pas vraiment pour qui connaît le travail de ce couple de cinéastes à la fois sur l’homosexualité et sur la mémoire gay, tant ce film se situe – dans un registre nouveau – dans cette lignée qui va de Jeanne et le garçon formidable à Nés en 68 en passant par Drôle de Félix ou Ma vraie vie à Rouen, et qui explore sous tous les angles l’identité gay et sa construction.

Après l’adolescence, le sida, le couple, la famille recomposée, c’est au tour du non-dit, du mensonge, de la double vie et de leurs conséquences que se bâtit ce film presque en huis clos (malgré la forêt du titre plantée au fil des ans, comme un remords ou comme un espoir dans l’avenir, par le personnage du père). Avec, en arrière-plan essentiel à cette bouleversante histoire de famille, une histoire plus large, elle aussi longtemps masquée, chargée de honte : notre histoire collective au fil des tragédies du siècle.

Une fois de plus, Olivier Ducastel et Jacques Martineau prouvent à quel point ils nous sont indispensables dans leur conscience toujours vive des enjeux «communautaires» et «militants » (pour utiliser de grands/gros mots) les plus essentiels. Et parmi ces enjeux, celui de la transmission de notre mémoire, de ce à quoi les homosexuels qui nous ont précédés ont été confrontés, de leurs luttes, de leurs oppressions, est à l’évidence un des plus importants qui soient.

 

L’Arbre et la forêt d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau (en DVD chez Ad Vitam)

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