Du cul, oui, mais du do-cul

Un regard neuf sur le plus vieux métier de monde. Loin du pathos qui sert généralement de prisme aux reportages sur le sujet, Jean-Michel Carré offre avec son documentaire Les Travailleu(r)ses du sexe une vision décomplexée et sereine de la prostitution. Un nouveau visage de cette profession décriée se dévoile au fil d’interviews sensibles et touchantes. Le projet de Jean-Michel Carré à travers ce documentaire : «réclamer un véritable statut pour ces travailleuses et ces travailleurs qui payent des impôts et ont le droit, comme les autres, à la Sécurité sociale ou à la retraite». Les témoignages qu’il collecte manifestent un agacement face à une opinion publique qui hésite trop souvent entre stigmatisation et apitoiement. Une des intervenantes s’en prend aux féministes : «elles ont très peur de notre droit à la parole. Les prostituées pourraient dire que c’est un boulot qui leur plaît, que les hommes sont gentils, parce que les hommes ne sont jamais aussi gentils qu’avec des prostitués. Et ça, elles ne peuvent pas l’accepter. Alors elles vont chercher des toxs dans la rue et évidemment elles ne trouvent que des gens qui ne vont pas bien». Maîtresse Nikita, prostituée travestie SM, égrène les compétences requises pour l’exercice du métier: «il faut parler anglais, éventuellement d’autres langues, il faut savoir entretenir une conversation avec le client, savoir négocier, avoir une bonne appréhension des rapports humains, même connaître un peu l’Histoire. Je me rappelle une fois avoir passé une nuit avec un ministre : il fallait assurer. Et combien de PDG j’ai conseillé alors qu’ils me léchaient les cuissardes !». Le documentaire de Jean-Michel Carré débute sur le constat de l’explosion du “marché du sexe”. Salons de l’érotisme, clubs de strip-tease, sociétés d’édition de revues pornographiques, toutes ces activités appartiennent de plus en plus à des sociétés cotées en Bourse. Daniel Melguish, directeur d’un sex-club pour femmes, explique : «tout ce qui touche au plaisir représente des marchés financiers énormes. Le marché français pèse plusieurs millions d’euros, il intéresse les investisseurs». À côté de ce nouveau business du sexe, la prostitution volontaire fait figure d’artisanat. Un isolement qui pourrait expliquer la stigmatisation de cette profession atypique. Isabelle confirme ce constat : «je continue à m’interroger sur ce qui dérange tant chez les prostitué(e)s. Nous faisons partie de l’ensemble de l’industrie du sexe sauf que quand on est prostitué(e), on ne répond à aucune logique de productivité. Nous sommes des artisans, au fond nous sommes un peu les nouveaux antilibéraux du sexe».

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