les celestins les sea girls - la revue credit Marie Vosgian

En 2016-2017, les Célestins tourneront en dérision l’actualité

Face à une actualité rendue toujours plus immédiate, la saison 2016-2017 du Théâtre Les Célestins intensifie, par ses choix artistiques, l’engagement habituel de la maison.

Claudia Stavisky et Marc Lesage, qui co-dirigent Les Célestins, souhaitent offrir aux spectateurs une vision mûrement réfléchie – celle des artistes – de notre actualité bien morose. Ô combien éloignés du discours conforme et médiatique des grandes chaînes d’information, les artistes de cette saison défendront leur conception du monde via les sujets vibrants du terrorisme, de l’insécurité, de la précarité et de l’environnement. D’une gravité certaine, ces thèmes seront toutefois toujours abordés avec humour et ironie.

La maison revendique également son engagement militant en prônant la diversité et en affichant un éclectisme assumé. Soucieux de respecter la parité tant sur scène qu’au niveau du processus créatif, le théâtre veille particulièrement à la visibilité des auteures et metteuses en scène. Autre moteur, l’équilibre des générations que respecte les Célestins vise à favoriser l’accès des plus jeunes comédiens et créateurs à la scène, sans pour autant en écarter les plus anciens.

Ravages de la cupidité… et de l’âgisme

C’est dans une logique mêlant humour théâtral et gravité de l’actualité que la saison commence. Après La Estupidez, l’actrice Karin Viard renouvelle sa collaboration avec Élise Vigier et Marcial Di Fonzo Bo dans Vera (du 27 septembre au 8 octobre), une création du réalisateur tchèque Petr Zelenka. Elle y interprète une directrice d’agence de casting arrogante à qui tout réussit. Sa carrière est au sommet et Vera jubile du pouvoir que ses associés lui confèrent. Elle commence à vendre des parts de l’entreprise qu’elle possède jusqu’à ne plus en être l’actionnaire majoritaire. Mais les autres actionnaires vont se lier contre elle et la licencier du jour au lendemain. C’est une véritable descente aux enfers qui s’amorce et qui nous rappelle que personne n’est à l’abri de la précarité. Reflet d’une société cynique et individualiste, Vera est un cocktail détonant qui nous dévoile la réalité sinistre du monde de l’entreprise.

Sous des airs de spectacle de cabaret, les Sea Girls nous emmènent à Brodway le temps d’un show aux accents de music-hall (du 15 au 31 décembre). Sur une mise en scène de Philippe Nicolle, les quatre danseuses paradisiaques se démènent et reprennent à l’unisson des grands noms de la chanson à texte comme Sophie Forte, Jean-Max, ou encore Pierre Vassiliu. Sea Girls – La Revue est un spectacle coloré, où les perruques côtoient joyeusement les paillettes et les robes fendues. Agnès Pat’, Judith Rémy, Prunella Rivière et Delphine Simon doivent leur longévité à un esprit clownesque sans égal, capable de tourner en dérision un monde qui nous malmène. Les Sea Girls abordent notamment le vaste thème de la vieillesse, mais elles le font avec une autodérision telle que tous les maux liés à l’âge paraissent totalement dérisoires.

Plongée dans les bas-fonds de la société

Comme un écho à l’humour désespéré de Bukowski ou au lyrisme frénétique de Kerouac, la troupe de théâtre La Meute proposera sa dernière création, La Famille royale (du 10 au 14 janvier 2017). Après le fulgurant Belgrade, Thierry Jolivet s’attaque à l’œuvre hallucinée de William T. Vollmann et dépeint une Amérique sombre dans laquelle la corruption règne en parfaite maîtresse sur un peuple de faibles et de ratés. L’histoire met en scène un détective privé, Henry Tyler, engagé par un homme d’affaire véreux pour infiltrer le milieu de la prostitution, à la recherche de la mythique “Reine des Putes”. On pénètre dans un univers sordide et glauque à l’humour grinçant, presque cauchemardesque mais qui n’en oubliera pas pour autant d’être foncièrement drôle.

La dernière création de notre sélection – Le Vent se lève (du 6 au 10 juin 2017) de l’artiste et interprète David Ayala – plongera le spectateur dans une critique virulente du capitalisme. Inspirée d’écrivains comme Pier Paolo Pasolini, Philippe Muray ou encore le marquis de Sade, cette coproduction met en lumière l’idiotie, décrite ici comme un syndrome sociétal provoqué par une addiction aux médias qu’ordonne le système de l’ultra-libéralisme. Dans cette vision révolutionnaire, les jeux vidéos, les réseaux sociaux et tous les moyens de communication 2.0 sont autant de drogues qui assouvissement les masses. La consommation s’apparente alors à une véritable religion et l’idiotie se répand telle une maladie qui contamine les habitants de “l’Empire”. Le Vent se lève est toutefois une œuvre pleine d’espoir qui ne manquera pas de faire rire aux éclats les spectateurs.

 

Théâtre Les Célestins, 4 rue Charles Dullin-Lyon 2 / 04.72.77.40.00 / www.celestins-lyon.org

 

Photo de Une : Sea Girls – La Revue © Marie Vosgian
Photo 2 : La Famille royale © Simon Gosselin

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