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Classés X – Épisode 9

[Ou comment faire des rencontres quand on est agent spécial…] Retrouvez tous les mois un épisode de Classés Xnotre feuilleton de SF queer, créé par Élise Bonnard et illustré par Cyril Vieira Da Silva.

L’agent Fox vérifie l’adresse plusieurs fois. Il avait un autre décor en tête. Mais c’est bien ici. Bâtiment rouge. Façade sans fenêtre. Porte dorée. Il donne trois coups sur la sonnette, comme indiqué dans l’annonce : « deux courts, un long ». Il attend. Mains moites. Migraine. Qu’est-ce qu’il fout là ? Seul…

Il déteste faire du terrain sans sa partenaire, mais Xana tenait à remettre de l’ordre au laboratoire et à continuer les analyses. Après l’autopsie sous champagne, ils avaient passé la nuit à fouiller le dark web à la recherche d’infos sur la psoralea bituminosa, seul élément récurrent de l’enquête. Ils voulaient renifler les profondeurs du web, pister la source de cette affaire. Les agents spéciaux avaient une intuition. Au petit matin, ils étaient tombés sur un gisement. Une dizaine d’annonces très (trop ?) faciles à décoder, malgré l’orthographe douteuse : « Salut. Sa va ? La petite nouvelle est arrivé. Vous serez pas déçu : fraîche, vertigineuse et dévorante. Avec cette bel plante, la vérité est ailleurs. Venir cherché sur place. Code : Zeta Reticulan ». Dans l’une des annonces, une adresse.

Au moment où il s’apprête à sonner une nouvelle fois, une voix rauque grésille dans l’interphone « Hi darling. What’s my name ? ». Fox se racle la gorge : « heu… your name is Zeta Reticulan ? » La porte dorée s’ouvre en un clic métallique. Prêt à dégainer son badge d’agent spécial, il entre.

Un air lourd et humide l’avale aussitôt. Sa peau, son nez, ses yeux sont en alerte. La vision semble irréelle. C’est un jardin, une jungle, un tableau. Des plantes partout, luisantes, carnivores, un palmier de trois étages, des lianes, des bonzaïs en pots, un bordel joliment organisé. Tout est taillé, pensé à la perfection. Le dallage de marbre noir sur lequel Fox avance est bordé de bassins, l’eau ruisselle partout.

« Welcome ». La maîtresse de maison, en kimono fluo, se tient immobile au centre de cet écrin de verdure. Une main levée vers quelques fruits imaginaires (Elle faisait son yoga ?), l’autre portant une longue cigarette à sa bouche.

« Tu as le fric ? » demande-t-elle sans préliminaire. Au lieu de sortir son badge, Fox lui tend une liasse de billets. Il est fasciné par le maquillage de son hôte. Le fond de teint donne à son visage un aspect velouté, animal. La couleur de sa coupe au carré est indéfinissable. Tantôt noire de geai, tantôt violacée. Une perruque qui change de couleurs ?

« Je viens pour la belle plante », bredouille-t-il. Après une seconde de silence, l’hôtesse rit puissamment en penchant la tête en arrière. « Mais baby, je suis une simple passeuse ! Mon rôle est de transmettre le geste aux profanes. Regarde et imite. » Elle pose deux mains en papillon sous sa poitrine et expire lentement. Sans réfléchir, Fox copie les mouvements en miroir inversé. « That’s it darling. Tu trouveras de quoi danser au Paradise Ranch. Voici l’adresse, et n’oublie pas : deux mains sur le plexus solaire, et pouf, tu redescends direct. »

À suivre…

 

 

© Illustration : Cyril Vieira Da Silva

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