mesure

Édito #162 : prendre la mesure

Il n’est pas certain que nous soyons déjà en capacité de prendre la mesure des résultats des élections législatives de juin dernier.

L’affrontement entre Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, largement commenté dans les médias au cours d’une campagne atone, a principalement mis en lumière le formidable coup de com’ du chef de file de la France Insoumise et son OPA réussie sur la gauche française. Mais a caché la vraie victoire de cette élection : le score historiquement haut du Rassemblement national qui fait entrer 89 député·es à l’Assemblée nationale, alors même que le mode de scrutin des législatives lui est d’ordinaire défavorable. Sans doute que le travail de sape des partis d’opposition traditionnels opéré depuis 5 ans par Emmanuel Macron a ouvert un boulevard au parti d’extrême-droite, antagonisant la vie politique française et faisant voler en éclats le barrage républicain. À présent, l’hémicycle va devoir composer avec ces élu·es qui ont bien peu de respect pour les valeurs de la République et les déconvenues qui nous attendent risquent d’être nombreuses dans les mois à venir. 

Face à cet horizon peu reluisant, il nous reste néanmoins l’été et la littérature. Pour s’extraire des petites phrases politiciennes, nous ne saurions trop vous conseiller de vous plonger dans les mots de Pier Vittorio Tondelli. L’auteur originaire d’Émilie-Romagne, né en 1955 et mort en 1991, a publié en 1989 Chambres séparées (Camere separate), roman qui suit l’histoire de Leo, un écrivain homosexuel italien, et de Thomas, son amant allemand atteint du sida. À la mort de ce dernier, Leo remonte le fil de sa mémoire et dessine par fragments cette relation quasi impossible vécue aux quatre coins de l’Europe. Le voyage, omniprésent dans une œuvre construite sur un va-et-vient incessant, est surtout une odyssée intérieure du narrateur qui décortique son rapport au sentiment amoureux, à la perte de l’être aimé et à l’écriture. La mélancolie qui se dégage du roman nous incite à vous conseiller de le lire au soleil plutôt que sous la pluie, afin de faire sécher sur la plage les larmes que la beauté de certaines phrases ne manqueront pas de vous faire verser. Cathartique.

© Nadia Khallouki

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