1983

1983, la découverte du VIH

En janvier 1983, une équipe de chercheur·euses français·es parvient à isoler le virus responsable du syndrome d’immuno-déficience acquise (sida).

Lorsqu’en 1981, des médecins américains identifient un nombre anormalement élevé de pneumocystoses et de sarcomes de Kaposi au sein de la communauté homosexuelle, ils ignorent tout des causes de cette épidémie et de ce qu’on n’appelle pas encore le sida. Dès l’année suivante, cependant, l’hypothèse d’un agent infectieux sexuellement transmissible se fait jour. Il faudra encore attendre quelques mois avant que celui-ci soit isolé. En janvier 1983, le docteur Willy Rozenbaum, de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, fait prélever un ganglion dans le cou d’un de ses patients et transmet cet échantillon à l’Institut Pasteur, où il est mis en culture par le professeur Luc Montagnier. Avec ses collaborateur·rices Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann, ils parviennent ainsi à isoler un rétrovirus qu’ils baptisent tout d’abord LAV (pour Lymphadenopathy-Associated Virus). En mai 1983, ils annoncent leur découverte dans un article de la revue Science. Celui-ci reste cependant prudent quant à la responsabilité du virus dans l’apparition de la maladie : “[son] rôle (…) dans l’étiologie du sida reste à déterminer”, peut-on lire en conclusion. C’est donc en toute bonne foi que Gai Pied Hebdo peut écrire, le 28 mai : “L’Association des Médecins Gais a protesté contre les outrances de certains médias qui ont annoncé, à l’issue d’une conférence de presse des chercheurs de l’Institut Pasteur, la découverte du virus responsable du SIDA. C’est faux, en l’état actuel des connaissances. Cette découverte pour importante qu’elle soit (…) est bien modeste par rapport à ce qui reste à découvrir. Elle ne permet aucune généralisation hâtive quant à l’agent responsable du syndrome de déficit immunitaire acquis”.

Deux équipes, un seul virus
Une controverse juridique et scientifique éclate rapidement lorsqu’un chercheur américain, Robert Gallo, pionnier de la recherche sur les rétrovirus humains, revendique la paternité de l’identification du virus, qu’il baptise, pour sa part, HTLV-III. Il sera plus tard démontré que LAV et HTLV-III sont, en réalité, un seul et même rétrovirus (qui prend définitivement, en 1986, le nom de virus de l’immunodéficience humaine, ou VIH) et que les équipes de Gallo et Montagnier ont travaillé à partir du même échantillon, issu du ganglion prélevé par le docteur Rozenbaum. S’il n’a donc pas été le premier à isoler le VIH, Robert Gallo a, en revanche, joué un rôle crucial pour démontrer qu’il s’agit bien de l’agent infectieux responsable du sida. En 2008, Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi reçoivent, pour leur découverte, le prix Nobel de médecine. Eux-mêmes déploreront que Robert Gallo et leur collègue Jean-Claude Chermann aient été ignorés par le comité d’attribution. Preuve, une fois de plus, que la mémoire collective est parfois bien injuste…

© Marie Hache

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