fiertés régionales

Repenser les fiertés régionales avec Mémoires minoritaires 

En juin, on profite des beaux jours et on rejoint aussi les cortèges des Prides qui fleurissent dans les différentes villes de France. Les Marches des fiertés régionales, c’est justement la thématique des expositions conçues par l’association Mémoires minoritaires. Rencontre avec son président, Roméo Isarte.

D’où vient ce besoin d’initier ce travail de mémoire gargantuesque autour des Marches des fiertés régionales ? 

Roméo Isarte : À la lumière de nos archives, nous avons réalisé que les premiers cortèges autonomes que l’on pourrait qualifier de LGBT+ dans les années 70 n’ont pas été mobilisés en commémoration des émeutes de Stonewall mais début mai dans le cadre de la fête du travail. Le but était de préserver cette mémoire locale qui est en réalité largement méconnue. Les Marches des fiertés sont des événements clés pour le calendrier associatif LGBT+, d’où l’importance d’en connaître leurs histoires. 

La première Pride à Paris s’est déroulée en 1977, presque vingt ans la séparent de la première Marche des fiertés en province (Rennes en 94). D’après vous, pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps ?  

Dès 1971 on note des manifestations LGBT+ à Paris, peut-on alors vraiment dire que c’est en 1977 que se déroule la première Pride ? Le travail de mémoire nous invite à réfléchir à ces dates que l’on prend comme références et qui occultent des événements passés. Le 1er mai 1971, il y a déjà un rassemblement de militant·es du FHAR (front homosexuel d’action révolutionnaire). La Marche des fiertés de 1977 partage des revendications que l’on retrouve dans les Prides américaines. Pour revenir à votre question, la capitale apparaît souvent comme une ville pionnière en termes d’initiatives LGBT+. Pourtant Lyon a accueilli le premier festival de cinéma LGBT en 1976 et a ouvert un local associatif pratiquement avant Paris. Néanmoins, la France est structurellement un pays très centralisé. Paris demeure une terre d’accueil pour les personnes LGBT+ et regroupe un quart des associations. La capitale concentre également une multitude de lieux de sociabilisation homosexuelle. 

Ces dernières années, la Pride de Lyon cristallise de nombreux enjeux et divise nos communautés LGBT+, avec d’un côté celles et ceux qui lui reprochent d’avoir perdu son accessibilité et d’autres qui aspirent à lui rendre une approche plus militante. Que pensez-vous de cette situation ? 

La Pride est un moment primordial de politisation pour nos communautés. Mais, c’est aussi l’un des premiers événements LGBT+ pour de nombreux jeunes. Il faut donc être en mesure d’éduquer et de sensibiliser une grande diversité de personnes. Dans le milieu associatif, il y a un grand turnover des militant·es. C’est un phénomène très cyclique et les militant·es n’arrivent pas à transmettre leurs mémoires. Je pense qu’il faut surtout créer un lien intergénérationnel pour communiquer et comprendre comment nous avons lutté. 

Mémoires minoritaires organise plusieurs événements pour le mois des fiertés et donnera à voir plus d’une centaine de documents historiques, pouvez-vous nous en dire plus ? 

Nous avons plusieurs projets en parallèle. La première exposition est abritée par le Rize, il s’agit d’un travail de restitution de photographies des Marches des fiertés régionales que nous organisons avec la DILCRAH et le CFL. Pour l’exposition à la Métropole de Lyon, nous exposerons les différents documents qui nous ont été transmis l’année dernière. Il y aura des périodiques (Arcadie, Futur, Lesbia, Gai Pied…) et des photographies. Nous souhaitons nous inscrire dans une dynamique de droit culturel : le but est de faire intervenir la communauté LGBT+ directement dans la construction de ses mémoires. 

À voir 

Histoire de la Marche des fiertés à Lyon 1979-2023 jusqu’au 10 juin 2023 au Rize à Villeurbanne.

Sous les paillettes : l’archive ! du 5 au 30 juin 2023 à l’Hôtel de Métropole à Lyon.

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