L’urophilie est-elle une pratique à risque ?

Chaque mois, Hétéroclite s’intéresse, en partenariat avec le Centre de Santé et de Sexualité de Lyon, à une pratique sexuelle. On plonge, pour cette première chronique, dans les eaux troubles de l’urophilie.

«Son truc, c’était les pissotières, et surtout les croûtes de pain qui trempent dans les grilles… Il racontait ses aventures… Il connaissait un vieux juif qu’était amateur passionné, un charcutier rue des Archives… Ils allaient dévorer ensemble… Un jour, ils se sont faits poisser…». Dans Mort à crédit, Céline évoque brièvement les soupeurs, les croûtenards, ces hommes qui laissent imbiber un morceau de pain toute une journée dans les pissotières publiques (certaines d’entre elles, les «tasses», étant par ailleurs des  rencontre homosexuelles), ramassent leur récolte le soir et la dégustent seuls ou entre amis ensuite. C’était en 1936. Les pratiques sexuelles et les fétichismes atypiques, en l’occurrence l’urophilie, ne sont donc visiblement pas tous nés au fond des backrooms cuirs de San Francisco dans les années 70…

Une pratique plus répandue qu’on ne le croit

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Les fantasmes liés à l’urine sont nombreux : on ne fait pas que la saucer, entre mecs. On peut jouer avec (que l’on soit homme ou femme), la boire, en imbiber ses vêtements, en remplir des couches, s’asperger avec et y trouver un plaisir sexuel. Bienvenue dans le monde humide de l’urophilie, de l’ondinisme, de l’urolagnie, des pratiques souvent taxées de déviantes et qualifiées de paraphilies en ce qu’elles peuvent différer des actes sexuels dits «normaux». Mais qui se révèleraient plutôt courantes et pas si «anormales» que ça. En effet, les nombreux forums sur le sujet ou même la multitude de sites (majoritairement gays) spécialisés dans les rencontres entre donneurs et receveurs laissent à penser que les pratiquant-e-s ne sont pas tou-te-s des déviant-e-s pervers-e-s isolé-e-s.

L’urine est même fédératrice ! Les sexclubs de Lyon, d’Hambourg, de Barcelone ou d’ailleurs, adeptes de soirées à thème et soucieux de nos envies, proposent souvent une soirée uro hebdomadaire ou mensuelle, avec promo sur la bière. Sur place, on y trouvera des urinoirs sans tuyauterie (à vous de jouer le siphon) ou des pissotières reliées à une seule évacuation, au sous-sol, qui se termine en pommeau de douche (à vous de jouer à douche-pipi). À Lyon, le Men Club (2 rue d’Herbouville-Lyon 4) propose ainsi des week-ends «fist-uro» tous les mois.

Santé !

On trinque à l’eau ? Presque. L’urine est un liquide biologique qui constitue la plus grand part des déchets liquides du métabolisme de l’être humain et qui résulte globalement de la filtration du sang par les reins. Le principal composant de l’urine (à 95%) est l’eau mais elle contient aussi de nombreux autres composants chimiques et organiques. Globalement, l’urophilie présente peu de risques. La peau est un obstacle naturel contre les bactéries et les virus. Et l’urine est normalement stérile, sauf en cas d’infection urinaire. Il faut toutefois être vigilant-e-s : avant de trinquer, mieux vaut connaître les risques !

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Car avaler de l’urine est déconseillé : en effet, si le partenaire a une infection urinaire ou une IST, il peut avoir du sang dans les urines et il existe alors un risque de transmission du VIH. Pour les personnes qui tiennent à boire de l’urine, il faut que leur partenaire n’ait pas d’infection urinaire, boive beaucoup avant le rapport de manière à éliminer le plus possible de germes et évite enfin de prendre des médicaments ou des vitamines durant les 48 heures qui précèdent. Ce type de précaution peut diminuer les risques de contamination par des agents bactériens ou viraux. Il semble donc important de connaitre ses partenaires de jeu.

Attention au contact avec les muqueuses

Par ailleurs, en cas de contact avec une peau lésée, avec les yeux ou avec des muqueuses comme le vagin ou l’anus, il peut y avoir transmission du virus de l’hépatite B, et, en cas de sang dans les urines, transmission du VIH. Le danger est le plus grand lorsque l’émission urinaire est précédée d’une éjaculation (car du sperme peut être présent dans les urines) et a fortiori si des sondes urinaires ont été utilisées avant (présence possible de sang dans l’urine liée aux lésions).

Maintenant informé-e-s, on peut arroser ça, ou pas. Joyeuses fêtes !

 

centre de sante et de sexualite lyon c2s logoChronique réalisée en partenariat avec le Centre de Santé et de Sexualité de Lyon

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